1er Roman/États-Unis 6 juin Samuel Western

Paru en 2015 aux Etats-Unis, Canyons est le premier roman de Samuel Western, mais l'auteur né dans le Vermont en 1956 et installé depuis des années dans le Wyoming, dont le CV fourni par son éditeur précise qu'il a été marin dans la marine marchande suédoise, bûcheron, pêcheur professionnel, docker, guide de chasse et enseignant, n'est pas un perdreau de l'année. Ce western psychologique, moins classique qu'il n'en a l'air, porte la marque de toutes ces expériences. La scène d'ouverture claque comme un coup de feu fatal. Un jour d'octobre 1970, dans l'Idaho, trois jeunes « à peine sortis de l'adolescence » tirent sur des oiseaux. Une manipulation malencontreuse de fusil de chasse de Ward, et sa copine Gwen est atteinte d'une balle dans la tête, sous les yeux de son frère jumeau, Eric. Après un saut de vingt-quatre ans dans le temps, on retrouve les deux survivants du drame : Eric, originaire du Nebraska, survit difficilement à Los Angeles comme musicien de studio. Du temps où « on l'appelait en priorité pour enregistrer avec des légendes » et où les royalties lui assuraient un train de vie plus que confortable, il ne lui reste plus que sa vieille Porsche 911, un micro de valeur et quelques précieuses guitares de collection dont une Stratocaster à 15 000 dollars. Ward, de son côté, n'a pas eu l'avenir que lui promettait son statut social de jeune homme bien né : sa riche famille a perdu son ranch de l'Idaho et il s'est replié avec sa femme et ses trois enfants sur une vaste propriété, beaucoup moins prospère, du nord du Wyoming, près du Montana. Les deux amis de jeunesse se croisent lors une réunion d'anciens élèves de l'Université de Berkeley à San Francisco où ils étudiaient la philosophie. Encouragé par sa femme, Lorraine, qui a grandi dans une communauté chrétienne fermée, Ward propose à Eric de venir chasser le cerf dans les Bighorn Mountains. Entre le premier accablé d'un « repentir infini » et le second hanté par la vengeance, l'heure du règlement de comptes semble avoir sonné. Un rendez-vous qu'Eric, qui a acheté pour l'occasion « la carabine préférée des snipers », voit comme sa « mission ».

Dans les décors naturels grandioses du Wild West, qui rappellent ceux du huis clos duSignalde Ron Carlson,Canyonsest une méditation métaphysique-le pardon est-il quelque chose que l'on reçoit ou que l'on se donne ? Toutes les dettes sont-elles solvables ?-où l'on évoque Hegel, Heidegger, Schopenhauer, Descartes ouLe courage d'êtrede Paul Tillich. En dépit de leur connaissance très pratique des armes et des guitares, de la traque et du dépeçage du gibier, les deux protagonistes, qui discutent de la foi et du doute tout en pistant leurs proies à cheval, n'ont pas tout à fait le profil habituel d'un rustique cow-boy et d'un musicien doué déchu. Leur chasse à la rédemption, si elle offre une fin de partie tragique, comme il se doit, ouvre aussi une piste d'apaisement.

Samuel Western
Canyons - Traduit de l’anglais (États-Unis) par Julianne Nivelt
Gallmeister
Tirage: 5 000 ex.
Prix: 21,40 euros ; 224 p.
ISBN: 9782351781937
03.05 2019

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