Maison sans maître. « Vous savez que c'est la maison de ma grand-mère que vous achetez ? » Face à l'investisseur, Emma peine à contenir sa colère. Si les siens se sont laissé embobiner par le baratin du futur propriétaire de leur maison de famille, elle n'entend pas se laisser déposséder sans rien dire. « Personne ne lui a expliqué qu'il allait s'approprier une bonne partie de mon enfance, fouler aux pieds mes souvenirs, déranger mes fantômes. Alors que rien de tout ça n'est à vendre. » Mais tous ne portent pas le même regard sur la demeure, « maison ogre » pour Carole, la mère d'Emma, qui craignait qu'elle n'avale ses trois filles quand, petites, elles jouaient à cache-cache dans ses jardins. Tour à tour, ceux qui l'ont aimée ou détestée prennent la parole pour en raconter l'histoire, intimement liée à celle d'une femme flamboyante, la grand-mère d'Emma, dont l'esprit semble encore hanter les lieux. Elle, elle n'aurait jamais accepté de vendre à un homme vivant « entre les pages d'un business plan ». Maître de Bausset-Roquefort lui-même, le notaire chargé de la transaction, reconnaît que « cette vieille demeure mérite bien mieux que lui ».
Si la bataille semble perdue d'avance pour Emma, dont le jeune âge prive de poids sa parole aux yeux des siens, la maison, que l'on appelle parfois « maison de maître » réfute avoir appartenu à qui que ce soit, elle qui a vu naître des générations et s'éteindre des lignées. Roman polyphonique à la saveur douce-amère, L'or et le sel explore ce qui nous rattache aux lieux, parfois membres à part entière de la famille qui les occupe avant que le vent ne les emporte.