« Zéroland avait un roi taciturne et méfiant qui n’avait jamais franchi les frontières de son royaume. Il n’avait jamais déclaré la guerre. Ce roi était difficile à comprendre parce qu’il n’avait aucun désir… »
Pour Alessandra, 17 ans, la guerre est déjà perdue. Elle a signé l’acte de reddition le jour où s’est éteint l’être le plus cher, sa mère, vaincue par le cancer. Pour elle, depuis, le monde est désert, et l’hiver plus qu’une saison, un sentiment. Revenue au lycée, Alessandra va se lier peu à peu avec le plus mutique de ses camarades, Gabriele. Son absence de fortune et supposément d’intérêt l’a fait surnommer « Zéro ». Ces deux réprouvés, laissés de côté par les désirs de leur âge, vont se construire un univers à eux, fragile, un peu austère et secrètement précieux ; ce sera leur « Neverland » à eux, leur « Zéroland »… Gabriele et Alessandra auront un an, un an seulement, pour étancher leur soif de consolation, redonner au monde un sens ou au moins, une harmonie.
Cette pavane pour deux orphelins qui se tiennent chaud, c’est Mon hiver à Zéroland, le premier roman d’une libraire milanaise, Paola Predicatori. Ce fut l’un des grands succès de l’année littéraire écoulée en Italie, suscitant déjà plus de dix traductions partout dans le monde et une future adaptation pour le grand écran. Certes, le thème ou l’argument peuvent sembler un rien rebattus, mais Paola Predicatori parvient à une puissance d’incarnation dont on s’étonne qu’elle soit celle d’une primo-romancière. L’œuvre matrice de cet hiver-là est bien sûr L’arrache-cœur (qu’Alessandra connaît quasiment par cœur), mais la profonde humanité nichée ici au sein de la violence des jours de ces deux héros n’est pas sans rappeler le formidable Moi et toi de Niccolò Ammaniti (Robert Laffont, 2012). Il y a là plus qu’une promesse, un acte de foi. Olivier Mony