Avant-critique Roman

Philibert Humm, "Roman de gare" (Éditions des Équateurs)

Philibert Humm - Photo © Hélène Pambrun

Philibert Humm, "Roman de gare" (Éditions des Équateurs)

Rentrée littéraire

Après Roman fleuve où il racontait un périple à la rame sur la Seine, c'est en train que Philibert Humm poursuit dans Roman de gare ses désopilantes tribulations.

Parution 28 août

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Par Jean-Claude Perrier
Créé le 23.08.2024 à 09h00

La béate génération. Après Roman fleuve (Édition des Équateurs, 2022, prix Interallié), exploration farfelue de la France des cours d'eau à force de rames, on se doutait bien que Philibert Humm, Callaghan de son surnom d'aventurier, n'allait pas en rester là. En effet, énervé par son banquier qui a l'audace de lui parler de la situation de son compte, le voici qui décide de partir vers les grands espaces dans une exploration digne des plus grands écrivains voyageurs, les Jack London, Mark Twain et autres Jack Kerouac. En compagnie d'un acolyte aussi improbable que vulgaire, le gros Simon, alias Buck, son Bérurier à lui, il embarque clandestinement à bord de trains de marchandises. Une épopée de huit jours, partie de la gare de Villeneuve Triage en banlieue parisienne et qui s'achèvera dans celle de Miramas au sud-est de Nîmes, parce que Buck s'est cassé la margoulette et amoché le pouce.

Piteux, les deux amis ont dû écourter leur périple et regagner Paris en train payant. Un comble pour ces deux aspirants marginaux, ces deux bobos rebelles résolus à se faire clochards célestes, voyageurs sans but, sans bagages et sans scrupules, tout au moins pour Buck, trop hobo pour être honnête. Leurs villes étapes se nomment Gerzat, Puy-de-Dôme, près de Clermont-Ferrand, Sibelin, non loin de Lyon, ou Remoulins, dans le Gard. C'est là que des gendarmes les repèrent. Ils ne les lâcheront pas aisément. Buck en profitera pour disparaître, causant une sacrée frayeur à son compagnon. Toujours affamé, il était juste parti en quête de nourritures terrestres un peu consistantes.

C'est l'une seulement des mésaventures de ces nouveaux Pieds Nickelés, qui ont appris à lire dans Tintin et Pif Gadget. Mais pas que. Humm a des lettres et nous offre des citations de quelques-uns de ses auteurs favoris ainsi que des dessins de sa plume, qui scandent agréablement le récit. Il instaure, et c'est sans doute le plus drôle de ce livre désopilant, une relation de familiarité avec son lecteur, sans cesse apostrophé sur le ton de la complicité et de la confidence. Le temps, même, à un moment, s'abolit : page 78, l'auteur s'interrompt pour aller déjeuner et ne réapparaît que six pages plus loin, laissées blanches. Il était parti déguster un aligot dans son bistrot favori, au Réveil (Paris 10e) ! Comme chez Bret Easton Ellis ou chez SAS, on a droit à tous les détails et même à du name-dropping (que l'on espère rétribué : ça fera plaisir au banquier du début). On l'aura compris, Roman de gare nous ramène un jeune écrivain au mieux de sa forme et de son talent, maître ès parodie, styliste virtuose à l'imagination débridée. À plusieurs reprises, lorsque défile un paysage ou quand il rencontre quelqu'un de sympa comme Marie-France, la gargotière de Remoulins, affleure également quelque chose de précieux : la tendresse. Au fond, Philibert est un « hummaniste ».

Philibert Humm
Roman de gare
Éditions des Équateurs
Tirage: 10 000 ex.
Prix: 22 € ; 240 p.
ISBN: 9782382846827

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