Des cailloux dans les souliers. Augustin a tout pour lui, amour, gloire et beauté. La gloire surtout, héritée d'un best-seller dont il est l'heureux auteur surmédiatisé. Cependant, jouer la star lui pèse, assumer le rôle le navre. Mais renoncer au tourbillon des feux de la rampe s'avère un exercice hautement périlleux. Pour quitter le pouvoir qu'on lui attribue, il lui faut d'abord et singulièrement se départir de celui des autres : politiques, policiers, réseaux sociaux, donneurs de leçon, décideurs, quémandeurs, faiseurs de réputation... Il n'en peut plus des « indignations automatiques et des prises de position mécaniques ». Hélas, plus il cherche à s'effacer, plus ses actes sont interprétés par certains comme de la géniale rébellion et par d'autres comme la trahison d'un embourgeoisé pédant. Partisans, opposants : même pouvoir, de nuisance surtout. Les inepties d'un Hexagone version chanson de Renaud ravivent la jeunesse anarchiste -d'Augustin, mais l'engrenage des emprises opère comme un garrot. Là ressurgit le goût de Sébastien Rutés pour les cauchemars inextricables déjà souligné par l'inspiré Mictlán en 2020. À la lisière du noir, l'auteur mène avec Le syndrome du cordonnier une réflexion aboutie sur les ancestraux ou nouveaux carcans de nos sociétés. Il y a du Kafka dans l'air rare, du Pline l'Ancien ou du Manchette aussi. Ou comment de frêles étincelles peuvent couver jusqu'à embraser le crétinisme de masse et déclencher d'absurdes révolutions. L'avis est adroit et prouve que, hélas, les trompettes de la renommée sont toujours aussi mal embouchées.
Le syndrome du cordonnier
Gallimard
Tirage: 3 500 ex.
Prix: 20 € ; 304 p.
ISBN: 9782073105202