Allemagne

Depuis l’annonce du dépôt de bilan des éditions Suhrkamp, le 6 août dernier, l’atmosphère ressemble un peu au calme qui précède une prochaine tempête. Dans l’attente d’un jugement sur le plan de redressement proposé par la maison (voir Livreshebdo.fr du 7 août 2013, rubrique étranger), qui devrait intervenir ces jours-ci, la presse allemande se livre à des spéculations sur cette affaire qui oppose âprement les deux actionnaires de l’entreprise. D’un côté, Ursula Unseld-Berkéwicz, veuve de Joachim Unseld, l’ancien patron charismatique, actionnaire majoritaire avec 61 % du capital via une holding familiale, et de l’autre, Hans Barlach, homme d’affaires spécialiste des médias, qui détient 39 %.

Selon le site du Tagesspiegel, plusieurs titres de presse auraient même choisi leur camp, pendant que les principaux protagonistes s’expriment très peu, ou pas du tout dans le cas d’Ursula Unseld-Berkéwicz. Les journaux de Francfort (Frankfurter allgemeine Zeitung) et de Munich (Süddeutsche Zeitung) prendraient plutôt le parti d’Ursula Unseld-Berkéwicz, pendant que le berlinois Die Welt, du groupe Springer, se rangerait du côté de Hans Barlach. Ce quotidien avance notamment que, à l’issue du jugement, Hans Barlach pourrait voir son pouvoir et sa participation s’affaiblir considérablement.

Tout est devenu terriblement complexe dans cette affaire dont l’avenir se joue devant le tribunal d’instance de Berlin-Charlottenburg, où est installé Suhrkamp depuis 2010, mais aussi à Francfort, siège historique de la maison, pour des litiges connexes. Car les coups volent parfois très bas sur fond d’intenses luttes de pouvoir entre les protagonistes mettant en péril l’un des plus illustres éditeurs allemands, fondé en 1950 par Peter Suhrkamp, et mené avec brio entre 1959 et 2002 par Joachim Unseld, qui a donné au catalogue un éclat unique en littérature et en sciences humaines. Le Tagesspiegel relève d’ailleurs la part trop importante à son goût qu’occupe l’affaire dans la presse : « Ne ferait-on pas mieux de s’intéresser, par exemple, aux poésies de Sylvia Plath, traduites pour la première fois en allemand, ou à l’essai de Hans Magnus Enzensberger Herrn Zetts Betrachtungen, parmi les nouveautés passionnantes qui paraissent à la rentrée ? » dit en substance le magazine. Annie Favier

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