Rentrée littéraire 2024

Quelles tendances pour les premiers prix de la rentrée littéraire ?

Certains romans de la rentrée commencent déjà à susciter l'intérêt des jurys littéraires. - Photo Léon Cattan

Quelles tendances pour les premiers prix de la rentrée littéraire ?

Les lauréats du prix Transfuge, du prix des Écrivains chez Gonzague Saint Bris, du prix Méduse, du prix Maison-Rouge ou du prix Envoyé par La Poste annonceront-ils la couleur des grands prix d’automne ?

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Par Léon Cattan
Créé le 30.08.2024 à 16h08

459 livres parus ou à paraître et des librairies en effervescence. Pas de doute, la rentrée littéraire est sur les rails. Et avec elle, la saison des grands prix. En 2023, elle avait été marquée par le premier Goncourt de l’Iconoclaste (Veiller sur elle de Jean-Baptiste Andrea), l’émergence de Neige Sinno (prix Femina) et le couronnement d'Ann Scott (prix Renaudot), Dominique Barbéris (prix du roman de l'Académie française), Gaspard Kœnig (prix Interallié) et Kevin Lambert (prix Médicis). Pour 2024, les spéculations et pronostics vont déjà bon train, en s’appuyant notamment sur les premiers palmarès de la saison.

De l’Algérie à Los Angeles 

À chaque rentrée ses poids lourds, et ceux de l’année s’appellent Kamel Daoud, Emma Becker et James Ellroy. Encensés par la critique française, leurs derniers romans récoltent les premières distinctions. À commencer par Houris, qui marque l’arrivée de Kamel Daoud chez Gallimard. Le roman a reçu le 28 août le prix du meilleur roman français de la revue Transfuge, et il est considéré comme un sérieux candidat aux prix d’automne. Exhumant les traumatismes des guerres civiles algériennes, Houris utilise la métaphore comme « révélateur d’une réalité âpre, sanglante, selon Sean Rose, pour Livres Hebdo. Et ces larmes de plomb se muent en appel au devoir de mémoire, devenant aussi sonores qu’un cri de résistance et de liberté, d’espérance d’une nouvelle aube. »

Autre pays, autre Histoire. Le cador du polar James Ellroy est lui aussi récipiendaire d’un prix Transfuge qui honore l’ensemble de sa carrière. Le 18 septembre, Rivages fera paraître Les Enchanteurs (trad.  Sophie Aslanides), troisième tome du Quintette de Los Angeles revenant, entre autres, sur le décès de Marilyn Monroe en 1962.

Liaisons dans l’autofiction

Et qu’en est-il d’une vision plus personnelle de l’histoire, tournée vers l’intime ? L’autofiction, éternelle tendance des rentrées littéraires, n’est pas en reste dans ces premiers palmarès. Autre prétendante sérieuse, Emma Becker a tiré son épingle du jeu au festival des Écrivains chez Gonzague Saint Bris pour Le mal joli (Albin Michel, 21 août 2024).

Un exercice d’écriture de soi qui « s’est imposé de lui-même » d’après l’autrice dans une interview à Livres Hebdo. À propos de ce fiévreux récit d’adultère, elle raconte : « Vivre une histoire adultère peut arriver à tout le monde. Mais l'écrire, c'est autre chose, car le procédé implique celui qui écrit mais aussi ses proches, dont la vie privée est exposée. L'exigence de vérité m'aide à surmonter cette culpabilité. Je ne cherche jamais, dans mes livres, à m'exposer sous mon meilleur jour. Le mal joli ne pouvait être écrit du bout des doigts : il me fallait tout dire, avec ce que la vérité comporte d'indignités, dans le fait de tomber amoureuse d'un autre homme que son époux et de prendre le risque de briser l'équilibre familial, mais aussi dans l'intimité des corps. » 

Une affaire de famille(s)

Aux histoires d’amour, le primo-romancier Anatole Edouard Nicolo a préféré les histoires de famille. Il recevra au début du mois de septembre le prix Envoyé par La Poste pour À l’ombre des choses (Calmann-Lévy). Créé il y a dix ans pour soutenir les talents émergents, ce dernier a déjà récompensé des auteurs à la renommée maintenant établie, comme Jean-Baptiste Andrea, Goncourt 2023, qui avait été couronné en 2017 pour Ma reine (L’Iconoclaste). « Comme souvent chez les primo-romanciers, À l’ombre des choses est largement autobiographique. C’est sympa, bien dans l’air du temps, et l’auteur y révèle un petit ton personnel », écrit Jean-Claude Perrier dans nos colonnes. Dans « l’air du temps » semble en effet être le terme approprié pour ce roman qui relate le parcours accidenté de deux frères, faisant écho à la propre vie d’Anatole Edouard Nicolo. Peut-être que l’intuition du jury du prix Envoyé par La Poste se concrétisera plus tard.

Dans Alors c’est bien, paru dans la collection L’Arbalète de Gallimard, Clémentine Mélois sort aussi les albums-photo, à la gloire de son père décédé. Le roman, qui a reçu le prix Méduse cet été, déploie, selon nos chroniqueurs, « un bel hommage à un père artiste dans un récit plein de bonne humeur excentrique. »

Problèmes de société

Le jury du prix Maison-Rouge 2024 a opté, pour sa part, pour un peu de fantastique avec La Vie des spectres, de Patrice Jean (Cherche-Midi). L’auteur de L’Homme surnuméraire (Éditions Litos, 2023) y met en scène un journaliste de presse régionale propulsé dans une polémique. Abandonné par sa famille, il s’installe dans un pavillon abandonné… ou presque. Par l’invocation de fantômes, le roman esquisse une critique détournée de l’époque, qui résonne avec un certain nombre de propositions éditoriales récentes, où le fantastique et la science-fiction servent à aborder des problèmes de société.

Enfin Célestin de Meeûs recevra à Nancy le prix Stanislas à la mi-septembre pour Mythologie du .12Comme Patrice Jean, l'ouvrage formule une critique sociale diluée dans la fiction à propos du désœuvrement de la jeunesse et de la violence s'exerçant à son encontre. 

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