Un millier de réponses en moins 48 heures. C’est ce qu’a recueilli à sa mise en ligne l’enquête "Auteurs 2016" lancée par les Etats généraux de la bande dessinée (EGBD), association née il y a un an de l’inquiétude des auteurs du secteur face à la dégradation de leurs conditions de travail (1). La promptitude et l’ampleur des réponses témoignent du besoin des créateurs de bande dessinée de s’exprimer et de comprendre leur milieu professionnel. Il a d’abord fallu, pour partir sur des bases saines, définir l’auteur de BD et identifier ses particularités par rapport, par exemple, au romancier. Le comité scientifique des EGBD a concocté un questionnaire de près de 80 entrées sur le parcours, les conditions de travail, les publications, la promotion, les revenus ou les droits sociaux des auteurs du 9e art. Ce questionnaire a recueilli, entre le 15 septembre et le 15 novembre 2015, 1 469 réponses validées par l’économiste Thomas Paris et deux de ses élèves d’HEC, qui ont assuré le traitement et l’analyse statistiques, tandis que Denis Bajram a mis en forme l’enquête. Livres Hebdo se l’est procurée avant sa présentation lors du Festival international de la bande dessinée d’Angoulême, vendredi 29 janvier de 11 h 30 à 13 h 00, à l’espace Franquin (1).
Périmètre étendu
"L’originalité de notre démarche est qu’au départ il y a une association et non une structure publique, commente Benoît Peeters, président de l’Association EGBD. Certes, nous avons peu de moyens mais nous sommes très proches du métier, ce qui explique le grand nombre de réponses. Près de la moitié des créateurs de BD !" Les répondants au questionnaire sont restés anonymes et tout individu se considérant comme créateur de bande dessinée, amateur ou professionnel, était invité à répondre, du moment qu’il diffuse son travail via un blog, l’autoédition, ou l’édition traditionnelle. Tous les métiers, que ce soient les scénaristes, les dessinateurs ou les coloristes, étaient appelés à participer. Chacun pouvant se définir selon trois catégories : amateurs (15 % des répondants), professionnels précaires (53 %) ou professionnels installés (32 %).
Le caractère très étendu du périmètre et l’impossibilité de vérifier l’identité des répondants introduisent quelques imprécisions, mais l’étude vaut par la quantité, le détail et l’originalité des questions, ainsi que par la franchise des réponses, notamment concernant des sujets tabous tels que les pourcentages de droits d’auteur ou des avances perçues. L’ensemble des réponses constitue une base de données qui permet de dresser une cartographie du groupe professionnel des auteurs de bande dessinée. Une profession jeune, qui ne peut vivre, dans son immense majorité, uniquement de la BD et qui est plutôt inquiète quant à son avenir puisque 66 % estiment que leur situation va se dégrader dans les prochaines années.
(1) Voir notamment "Bande dessinée : les raisons de la colère", LH 1028, du 6.2.2016, p. 22-25.
(2) Une version numérique de l’étude sera disponible à partir du 5 février sur le site www.etatsgenerauxbd.org.