Un an après, « le choc des savoirs », vaste plan de réforme scolaire annoncé par Gabriel Attal alors ministre de l’Éducation nationale, reprend du souffle et ce sont tous les éditeurs scolaires qui respirent.
« Nous sommes soulagés, fait part à Livres Hebdo Valérie Barthez, directrice de l’Association des éditeurs scolaires. Les éditeurs ont enfin un peu de visibilité sur le calendrier à venir ».
Il faut rappeler que cette ambitieuse réforme du primaire au lycée a subi la conjoncture politique française de ces derniers mois et n’a pas été loin d’être tuée dans l’œuf. Mais en début de semaine Anne Genetet, la locataire actuelle de la rue de Grenelle, a présenté une nouvelle mouture du projet de réforme, qui reprend les mêmes enjeux pour les éditeurs scolaires.
Des ouvrages attendus pour la prochaine rentrée
« C’est une réforme importante dont le calendrier a glissé d’un an », souffle Valérie Barthez, qui doit rencontrer dès la semaine prochaine le Ministère pour éclaircir certains points. Et le temps presse déjà, car les nouveaux programmes pour les cycles un et deux du primaire sont attendus dès la prochaine rentrée de septembre.
« Il y a des programmes encore plus fournis avec certaines notions qui sont anticipées, analyse Marie-Agnès Bousquet-Rudy, directrice générale de Nathan maternelle et primaire. En tant qu'éditeur scolaire, on doit les comprendre et les traduire de la meilleure façon possible pour les enseignants ».
Parmi les préoccupations des éditeurs, la mesure de labellisation des manuels scolaires, maintenue dans cette mouture du « choc des savoirs ». Il s’agit pour l’État, qui maintient une ligne budgétaire pour le financement de manuels pour certains territoires (ZEP, ZEP+ et zones rurales), d’aiguiller l’enseignant vers l’acquisition de manuels contrôlés par le Ministère.
Une labellisation toujours jugée « inutile »
« Nous continuons à dire que cette mesure est inutile, répète Valérie Barthez. Dans la mesure où un cercle vertueux est déjà en place avec le choix de l’enseignant au nom de la liberté pédagogique », qui exclut de fait les « ouvrages considérés comme mauvais ». Cette sorte de censure du ministère de l’Éducation nationale, inédite depuis les années 1940, ne passe pas auprès des éditeurs, qui proposent plutôt de créer une distinction entre les ouvrages du nouveau programme et ceux d’autres programmes. « Elle conduit à une difficulté supplémentaire dans la mesure où les programmes donnent déjà un cadre très précis », renchérit Marie-Agnès Bousquet-Rudy.
L’autre écueil de cette nouvelle réforme relevé par l’éditrice leader de son marché est la temporalité du changement des programmes. « Dans un monde idéal, il faut faire la réforme année par année, poursuit-elle. Or, cette fois, les enseignants auraient à ingurgiter des programmes du CP au CM2 d’un coup ». Avec les trous pour les élèves que cela engendre : des notions de l’ancien programme qui descendent d’un niveau dans le nouveau pourraient se retrouver dans un angle mort de l’éducation d’une génération. Et les enseignants se demandent comment ils pourront gérer cet écueil…
Contre mauvaise fortune bon cœur, les éditeurs scolaires font dorénavant avec cette temporalité toujours plus politique.