Si l’été est souvent synonyme de bilan, les résultats financiers dévoilés par Lagardère Publishing en juillet ont fait forte impression, avec des bénéfices en hausse de 48% au premier semestre 2024, tirés par l’international. Au global, le Résop de Lagardère Publishing s’élève à 113 millions d’euros, en hausse de 48 millions d’euros par rapport au premier semestre 2023. Une progression portée par « la croissance de l’activité au Royaume-Uni et aux États-Unis, un mix des ventes favorable sur les formats physiques et numériques, ainsi qu’une bonne maîtrise des coûts. »
Pour autant, le marché du livre aux États-Unis n’affiche globalement pas la même santé. L’an dernier, les éditeurs américains ont vu leurs ventes unitaires chuter de 5,7% et leurs revenus baisser également de 0,8%, détaillent nos confrères de Publishers Weekly.
Ces derniers nous relatent aussi une singulière controverse marketing opposant la maison d’édition St. Martin’s Press et un groupe d’influenceurs appelant à son boycott.
Si la censure reste un sujet brûlant partout sur la planète, le blocage de la plateforme Wattpad en Turquie, survenu le 18 juillet, a fait réagir les instances mondiales du livre, à commencer par l’Association internationale des éditeurs (IPA).
Fermetures et démolitions
En Allemagne, après la disparition de Buchreport en début d’année, la presse professionnelle du secteur compte une nouvelle victime : BuchMarkt, qui cessera de paraître fin 2024 après 59 années d’existence. Dans une interview visible sur le site du magazine, Julian Müller, son directeur général, évoque la baisse des abonnements et des revenus publicitaires ayant rendu « le travail quotidien de plus en plus difficile ». Le marché allemand conserve néanmoins un magazine professionnel dédié au livre, le Börsenblatt, fondé en 1834.
Autre disparition emblématique, relevée par le Prague Morning : celle, à Prague, du spectaculaire passage Vilimek, du nom de l’ancienne première maison d’édition et imprimeur de l’ex-Tchécoslovaquie, établie là en 1885. Première maison à traduire Jules Verne ou Arthur Conan Doyle en tchèque, elle fut nationalisée puis fermée à la fin des années 1940, mais son bâtiment restait un lieu phare de la vie culturelle et intellectuelle de Prague. Le 15 août, des travaux de démolition y ont débuté, devant permettre bientôt la construction d’un hôtel-spa de 195 chambres.
Ventes spectaculaires et rachat
Nos cousins québécois ont le sourire : dans la province francophone, les ventes de livres demeurent plus élevées qu’avant la période Covid pour le troisième année consécutive, nous apprend La Presse, relayant un bulletin de l’Observatoire de la culture et des communications de l’Institut de la statistique du Québec. Selon l'étude, la valeur des ventes en librairie dans la Belle province en 2023 est la plus élevée des 10 dernières années (à 457 millions de dollars canadiens, soit environ 300 millions d’euros) avec une hausse de 0,3% par rapport à 2022. Pour les éditeurs, les ventes ont connu en 2023 une troisième année consécutive d’augmentation, à 3,2%.
La Presse qui relate aussi le succès de l’opération « Le 12 août j’achète un livre québécois », qui a vu cette année une ruée « spectaculaire » vers les romans québécois, dont les ventes ont été jusqu’à 17 fois supérieures à l’ordinaire.
Du côté des bonnes nouvelles toujours, direction l’Australie, où nous avons appris cet été le sauvetage d’un acteur clé de l’industrie du livre : la librairie en ligne Booktopia. Après une introduction en bourse en 2020 et des ventes florissantes pendant la pandémie, l’entreprise s’était effondrée et avait formulé une demande de redressement judiciaire début juillet. Fin août, un communiqué de presse a annoncé un rachat par DigiDirect, une chaîne de magasins d’appareils photos qui promet vouloir conserver les employés actuels et une centaine de nouvelles embauches.
Reprise aussi Outre-Manche avec le rachat, relaté par The Bookseller, des activités de distribution, ventes et marketing d'Eurospan par le groupe Mare Nostrum. Rachat faisant suite à la mise en redressement judiciaire de la maison mère d'Eurospan, United Independent Distributors, survenue le 24 juillet.
Tendances : romance et… papier
Dans une époque plutôt marquée par les ravages de la sur-connexion et des réseaux sociaux, le Japon voit de son côté déferler la vague des « zines », magazines papiers artisanaux. Le très sérieux quotidien économique nippon Nihon Keizai Shimbun, relayé par le Courrier international, évoque la création de réelles communautés autour de ces petits imprimés qui font fureur autour de sujets très divers, de leurs mises à l’honneur dans les grandes libraires, ou des évènements qui leur sont consacrés.
De l’autre côté du Pacifique, après avoir révolutionné l’édition, la romance bouleverse maintenant les librairies américaines. Du Guardian au New York Times, le boom des librairies spécialisées dans la vente de romance a fait la Une cet été. « C’est un revirement total par rapport à l’époque où les romans d’amour étaient dédaignés car considérés comme de la littérature "de fille", frivole et légère, ou encore porno », écrit le New York Times, qui a recensé une vingtaine de librairies spécialisées dans le roman d’amour en 2024, contre deux en 2022. « Ces librairies ont en majorité des femmes pour propriétaires et gérantes », poursuit The Guardian. « Et les femmes sont le lectorat principal qui fait flamber les ventes de cette littérature, passées de 18 millions de livres papier en 2020, à plus de 39 millions en 2023, selon les chiffres de Circana BookScan », conclut le quotidien britannique.
Conséquence encore de cet engouement : Colleen Hoover place en cette fin d'été trois de ces titres aux trois premières places des meilleures ventes de livres au Royaume-Uni. « C'est la première fois qu'un auteur accomplit cet exploit depuis près d'une décennie », relève The Bookseller.