C'est en terrain en partie conquis que la nouvelle ministre de la Culture, Rima Abdul-Malak, s'est présentée aux 6e Rencontres nationales de la librairie qui se tiennent à Angers les 3 et 4 juillet 2022 avec 1200 participants, dont 700 libraires.
"Chère Rima, les libraires doivent d'abord vous remercier pour votre soutien lors de la crise sanitaire, en tant que conseillère culturelle du président de la République, dans la mise en place des aides publiques comme la prise en charge des frais d'expédition des livres, ou encore la reconnaissance du statut de commerce essentiel", a déclaré Anne Martelle, présidente du Syndicat de la librairie française, dans le grand auditorium du Centre des Congrès quasi comble en ce dimanche matin.
Inquiétude pour la bibliodiversité
Sous les applaudissements, le ton reste combatif. "Nous avons la chance d'avoir une ministre qui connaît bien notre profession et nos problématiques. Nous comptons sur vous pour faire avancer quatre dossiers prioritaires", a poursuivi Anne Martelle mentionnant le développement de la lecture, la fixation d'un prix minimum de frais de port pour les livres, la nécessité d'une concertation en vue d'élaborer un plan pour les salaires en librairie, sans oublier le projet de fusion entre Hachette et Editis.
"Concernant les enjeux de concentration dans l'édition, cela nous préoccupe beaucoup, a répondu Rima Abdul-Malak. L'Etat sera vigilant et travaillera avec tous les maillons de la chaîne du livre pour voir comment préserver la bibliodiversité." "Nous sommes en attente des recommandations de la Commission européenne, mais je suis inquiète du risque que cette fusion ferait peser sur la diversité de la filière", a précisé la ministre à Livres Hebdo.
"La force des femmes"
Parmi les autres points, l'ancienne conseillère culturelle du président de la République place la conquête des jeunes lecteurs en tête de ses préoccupations. Elle a par ailleurs annoncé "des discussions dans les prochaines semaines" concernant les conséquences de l'inflation pour les libraires. Enfin, le gouvernement serait "très attentif à ce que l'Arcep va décider" au sujet des frais d'envoi afin que cela "ne déforme pas l'esprit initial de la loi Darcos". Pour rappel, dans sa consultation publique, l'Arcep avait soumis une proposition portant sur un tarif minimum de frais de port de 3 euros. Un montant largement insuffisant selon le SLF qui aimerait le voir porter à 4,50 euros.
Sur une note plus personnelle, Rima Abdul-Malak, qui est franco-libanaise, a rappelé son attachement à la librairie. "Le premier lieu culturel dans lequel je suis allée était la librairie Antoine à Beyrouth, a-t-elle indiqué. C'était mon refuge, mon espace de liberté, un phare dans le chaos de la guerre". A New York, où elle a vécu durant quatre ans, elle a a par ailleurs accompagné l'ouverture de la librairie Albertine aux côtés de François-Xavier Schmit (interviewé ici). "J'ai passé beaucoup de temps à étiqueter les livres pour les ranger dans les rayons et j'ai pu voir que c'était un métier difficile où on a peu de marge, où le moindre aléa vous impacte : une tempête, une élection, une guerre, une pandémie…", a-t-elle raconté. Devant une assemblée largement féminine, la ministre n'a pas manqué de saluer "la force des femmes" qui créent et reprennent des librairies en nombre.