9 ET 17 NOVEMBRE - TRAITÉS France

En ce temps-là, Jean-Paul Kauffmann avait recommencé à se promener. A Bordeaux et en Champagne, en 1989 et 1990, peu de temps après l'épilogue heureux de sa détention libanaise. Cela donna naissance à trois livres, comme autant d'exorcismes, dont aucun ne fut jamais mis en vente. Il y eut d'abord Le Bordeaux retrouvé, dont la réédition est ardemment souhaitée. Puis à l'initiative de la Caisse des dépôts et consignations et à la seule intention du notariat français (sic), Voyage à Bordeaux et Voyage en Champagne, deux ouvrages jusqu'à ce jour introuvables, que l'auteur et les éditions des Equateurs ont décidé de rééditer, agrémentés d'articles et enquêtes parus dans les pages de L'Amateur de Bordeaux et, pour chacun des titres, enrichis d'un retour sur les lieux du crime.

En effet, relire les pages écrites alors revient à se remémorer un séjour en Atlantide... C'est d'un pays perdu (surtout pour ce qui concerne le Bordelais) dont il est ici question. Un pays d'avant la globalisation du goût, la spéculation sur les crus, le rachat par les capitaines d'industrie ou les investisseurs chinois. Jean-Paul Kauffmann, en entomologiste des cépages, en promeneur plus ou moins solitaire, maniant avec les propriétaires, comme avec leurs vins, l'art de la conversation, réenchante en quelque sorte le rêve vinicole français...

Il ne fait pas mystère de son tropisme bordelais, louant en des pages inspirées sa belle rigueur, son altière complexité, sa paradoxale unité en même temps que sa diversité. Pourtant, c'est peut-être dans les pages consacrées au champagne que l'on retrouve un Kauffmann comme rendu à lui-même, à son hédonisme obstiné et discret. Il s'y révèle aussi inconsolable et gai que le vin qui l'inspire. Il y est plus que jamais un "amateur", c'est-à-dire qui sait aimer et admirer : "L'admiration est une passion gaie, elle met l'âme et le coeur de belle humeur, augmentant la faculté d'agir et de savourer." Que demander de plus ?


 



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