Dans
une enquête publiée le 14 mai, le
Guardian détaille les difficultés des auteurs africains francophones et publiés en France à être édités dans leur pays en raison de nombreux facteurs "
propres à la France", tels que les refus de négociations dans les contrats de cession de droits. Laurence Hugues, directrice de l'Alliance internationale des éditeurs indépendants, confirme cette situation à
Livres Hebdo.
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Les éditeurs africains peuvent rencontrer des réelles difficultés à faire publier un auteur qui aurait déjà été publié en France", assure Laurence Hugues à
Livres Hebdo. Elle ajoute que l'enjeu, pour l'Alliance, d'une réédition d'un texte français en Afrique francophone, réside dans la large diffusion du texte à un prix abordable.
Obtenir des éditeurs français la promesse d'une parution en Afrique, c'est tout un "
processus de négociation, avec les personnes concernées", regrette la directrice qui se heurte à de nombreux refus de la part de "
beaucoup d'éditeurs français". Le refus porte dans la plupart des cas sur les classiques ??????africains, bien que les auteurs africains soient également concernés.
Si les éditeurs français acceptent la négociation, l'Alliance aide les éditeurs africains à trouver des financements et à garantir que les livres restent abordables, généralement au prix d'environ 4,5 euros.
Stratégies diverses
Face à cette réalité, un mouvement d'auteurs africains se dispensent de céder les droits mondiaux aux éditeurs français. Ils ont décidé de conserver leurs droits africains et veillent à ce qu'un ou plusieurs éditeurs locaux publient leur roman à un prix abordable sans passer par l'Alliance.
Certains lancent leur propre maison d'édition, comme Léonora Miano avec Quilombo Publishing, au Togo. Et d'autres font campagne, comme les membres du collectif "Front pour la libération des classiques africains". Dans une tribune publiée le 4 novembre dans Le Monde, ce Front appelait les éditeurs français à "rendre l’indépendance à ces œuvres qui continuent de façonner les connaissances et les imaginaires africains", ajoutant qu'il s'agissait "d'un devoir, une responsabilité historique".
"Mission délicate"
"C'est une mission délicate", explique Pierre Astier, fondateur de l'agence littéraire Astier-Pécher au Guardian. L'agence lutte pour les droits des auteurs contemporains africains et tente de faire un pas vers les éditeurs français qui détiennent des droits sur les classiques africains pour les convaincre de revenir sur certains d'entre eux.
Selon la romancière ivoirienne Véronique Tadjo, qui a décidé il y a vingt ans de conserver ses droits africains pour la publication de son roman L'ombre d'Imana (Actes Sud), "le mouvement est encore trop timide, mais il s'agit de prendre l'habitude, de s'organiser et de faire pression sur les éditeurs [français]. Ils doivent faire des concessions et porter une vision".