2 NOVEMBRE - PREMIER ROMAN Mexique

Juan Pablo Villalobos- Photo MT SLANZI/ACTES SUD

En apparence, le jeune Totchtli a tout pour être heureux. Il vit dans un vrai palais, avec piscine et zoo privé. Son papa, Yolcaut, lui achète tout ce qu'il désire, et il a plein de gens pour s'occuper de lui. Comme son répétiteur, Mazatzin, un érudit, écrivain raté qui professe volontiers des idées radicales. Mais le petit garçon a un problème, un énorme : jamais il ne sort de la maison. Car son père est un narcotrafiquant mexicain milliardaire et que son business exige qu'il vive sous haute sécurité.

Alors, Totchtli s'invente un monde à lui. Il apprend par coeur les mots du dictionnaire et utilise beaucoup ceux qui lui plaisent, pas toujours à bon escient, comme "précoce", "néfaste" ou "pathétique". Il est fasciné par la France et les Français parce qu'ils ont fait la Révolution et coupé la tête de leur roi. Et il se rêve en samouraï, du nom d'Usagi. "Quand on est japonais comme moi », écrit le pauvre gosse afin d'échapper à son quotidien.

Le gamin est précoce. Même s'il n'a pas toutes les clés pour comprendre les activités paternelles, même s'il ne sait pas bien ce que font tous ces gens bizarres que Yolcaut reçoit, il remarque et enregistre tout, avec sa propre logique. Et il tente de s'identifier à son père, un type assez simpliste : dans la vie, il y a "les mecs », comme eux, et "les pédés ». Tous les autres, à qui ils imposent leur loi, qu'ils menacent ou tuent quand ils deviennent trop encombrants.

Comme tous les enfants ou presque, Totchtli aime les animaux, et il finit par convaincre son père d'organiser pour lui un safari au Liberia afin d'attraper deux hippopotames nains dont il rêve depuis toujours pour son zoo. Voici les Lopez, senior et junior, en Afrique, où ils se conduisent comme ce qu'ils sont : des voyous pleins de fric mais d'une vulgarité consternante. A coup de millions, on parvient toujours à ses fins : un couple de mammifères est capturé, que Totchtli baptise aussitôt Louis XVI et Marie-Antoinette. Idée néfaste. Tout ceci ne peut se terminer qu'en désastre.

Pour son premier roman, Juan Pablo Villalobos, Mexicain qui vit à Barcelone, a choisi un pari toujours risqué : se mettre dans la tête d'un gamin d'une dizaine d'années - même assez particulier -, envisager le monde avec ses yeux, et le faire parler sans fausse note. Défi totalement réussi : Totchtli est un joli personnage, attachant, qui tente de se construire sur un tas de fumier. Dans le terrier du lapin blanc est un roman nerveux, drôle et terrible, parce que la violence et la cruauté y sont présentées comme évidentes, de même que les "discussions commerciales » du père. Le ton détaché du jeune narrateur fait, parfois, froid dans le dos.

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