Ecrans d'ordinateur, smartphones, tablettes... On lit partout et sur tout. Il n'empêche que la lecture de livres diminue fortement, au point qu'on se demande si, dans quelques années, il restera des lecteurs pour lire des ebooks.
Le noyau des gros lecteurs se réduit constamment. En 1997, selon l'étude sur les Pratiques culturelles des Français, 19 % de nos compatriotes de plus de 15 ans avaient lu au moins 20 livres dans l'année. lls n'étaient plus que 17 % en 2008.
Une situation qui affecte également l'industrie du livre numérique. C'est sur ces gros lecteurs, qui peuvent aussi être à l'occasion technophiles, qu'Amazon a prospéré aux Etats-Unis, comme nous le montrons dans notre dossier, "Le numérique en douze questions". Mais les "pure players", tout comme les acteurs traditionnels, ont fait le plein de cette espèce en voie de disparition.
Restent les lecteurs occasionnels. Leur nombre s'est fortement accru, mais ils demeurent particulièrement volatils et difficiles à séduire. Quant à les fidéliser, mieux vaut ne pas y penser.
"Pour les plus jeunes, explique dans nos colonnes Philippe Chantepie, spécialiste de l'économie numérique et chargé de mission au ministère de la Culture, la transition vers la lecture numérique comprend un risque de rupture, particulièrement sur les tablettes où elle est en concurrence avec la musique, les jeux vidéo ou n'importe quelle application à la mode."
Olivier Bessard-Banquy dans Les mutations de la lecture, l'ouvrage qu'il a dirigé aux Presses universitaires de Bordeaux, se penche lui aussi sur l'évolution de la lecture à travers les contributions de onze chercheurs et professionnels. Si certains d'entre eux mettent en évidence, chiffres et témoignages à l'appui, la disparition d'une lecture exigeante et la déplorent, d'autres comme l'éditeur François Gèze voient dans ces mutations une stimulation bienvenue. Le libraire Jean-Pierre Ohl, lui, se laisse le temps de voir venir : "En attendant de savoir à quelle sauce l'avenir mangera le livre, on profite de ces petits moments de bonheur que seul il peut nous donner. [...] On frissonne encore en entendant des simples mots : "Merci, vraiment, pour m'avoir fait découvrir ce livre."»