Un départ commenté
Les circonstances qui ont entouré son arrivée ont toutefois été largement commentées. Vanessa Springora a été promue suite au départ de Bernard Barrault et Betty Mialet, le tandem d’éditeurs qui dirigeait la maison depuis 1995. Ces derniers ont dénoncé la politique de la nouvelle branche édition de Vivendi. "L'évolution industrielle d'Editis, entérinée par son prochain déménagement sur de grands plateaux, nous donne le sentiment que nous ne parlons plus de la même chose", avait précisé à l’époque Betty Mialet. Leur départ prédisait surtout la fuite de nombreux auteurs de best-sellers, couvés par le binôme depuis des années, comme Jean Teulé, Yasmina Khadra ou Philippe Besson.
Pour l’heure, Yasmina Khadra reste chez Julliard et signe en août Le sel de tous les oublis, "un roman introspectif et picaresque" qui devrait "surprendre ses lecteurs par son ambition littéraire", indique Vanessa Springora. Philippe Besson signera aussi son prochain roman chez Julliard, à paraître à la rentrée d’hiver 2021. Et les autres romanciers du catalogue ? La nouvelle directrice préfère orienter la discussion vers ses nouveaux textes, incarnés par des primo romanciers comme Maylis Adhémar, auteure de Bénie soit Sixtine, à paraître en août. "Julliard s’est toujours définie par la découverte de nouvelles plumes et je souhaite poursuivre sur cette ligne", explique l’éditrice qui rappelle la présence dans le catalogue des premiers textes de Georges Perec et Françoise Sagan.
Textes réalistes et romans d'anticipation politique
Vanessa Springora a repéré deux tendances littéraires qu’elle compte nourrir ces prochains mois: des textes réalistes inspirés de sujets à caractère sociétal et des romans d’anticipation politique, proches de la littérature de l’imaginaire. Dans Bénie soit Sixtine, la journaliste Maylis Adhémar écrit l’emprise exercée par un milieu fondamentaliste religieux sur une jeune femme vulnérable. "Il s’agit d’un roman d'émancipation féminine sur un sujet de société très contemporain", selon la directrice de Julliard. Un autre premier roman arrive cette semaine, Amoureuses de Frédéric Baptiste où l’auteur évoque "l'invisibilité de l'homosexualité féminine dans les campagnes".
Dans la veine "imaginaire", Vanessa Springora met en avant la nouveauté de Samuel Doux, "auteur Julliard", à paraître en janvier. Dans Les enfermés, l’écrivain se penche sur les Hikikomori en France, ces personnes isolées qui refusent tout contact social physique. "Il travaillait dessus depuis bien avant le confinement", souligne la nouvelle patronne de Julliard qui cite aussi le prochain roman d’Arthur Nesnidal, Sourde colère, à paraitre en octobre. L'auteur propose "un récit d’anticipation qui met en scène le soulèvement de tout un peuple excédé par sa classe politique corrompue".
De nouveaux visages
La nouvelle rentrée de Jullard répondra aussi à une nouvelle charte graphique. Afin de renforcer la lisibilité de la couverture, la direction artistique a supprimé la jaquette en plastique ("devenue nuisible à l’environnement"). Les illustrations qui occupaient la pleine page sont désormais traitées "sous forme de fenêtre panoramique ou d’écran de cinéma, ouvrant sur l’atmosphère du texte et l'imaginaire de l’auteur". Le fond blanc met en valeur la typographie historique de Julliard dont le code couleur vert et la flèche sont maintenus. "Enfin, le format a également été modifié en 140mm x 189mm, pour aboutir à un livre plus carré, sur le modèle d’anciens ouvrages Julliard des années 50", ajoute Vanessa Springora, qui vient de renforcer son équipe en juin par l’accueil de Marie Lavallée, nouvelle éditrice junior.