13 JUIN - PREMIER ROMAN France

Sujet idéal pour une journaliste musicale, la triste et courte trajectoire terrestre d'Amy Winehouse méritait bien un livre, à la fois romanesque - l'auteure inventant des épisodes et des situations, se mettant dans la tête (explosée) et dans la peau (tatouée) de son héroïne -, et au plus près de ce qu'on connaît de sa réalité. Passant de la troisième à la première personne, Busty alterne reconstitutions et témoignages. Le tout forme une spirale autodestructrice où notre Amy se laisse entraîner - tout à fait consciemment. Elle en parle avec lucidité, humour et réalisme. Se saoule à mort pour arrêter de se droguer, et pour oublier ses déboires sentimentaux : son mariage raté avec Blake Fielder-Civil, son mauvais ange, son homicide involontaire.

On la suit à partir de 2007, l'année du triomphe de son second album, Back To Black, qui se vend par millions, et propulse la jeune femme au panthéon du blues. Voici Amy, riche et célèbre, devenue l'une de ces stars à qui l'on pardonne tous ses défauts, ses caprices, parce qu'on l'aime et tant qu'on l'aime. Mais à peine quatre ans plus tard, The Voice avait bousillé sa voix et son talent, découragé ses meilleurs amis, sa maison de disques, ses fans, à force de scandales, d'annulations ou de prestations lamentables. Elle est morte seule et désespérée, d'une overdose d'alcool apparemment, dans sa maison londonienne en juillet 2011. C'est là que s'arrête aussi le roman de Busty, un peu en queue de poisson d'ailleurs.

Pourtant, Amy s'était déprise de Blake et semblait n'avoir pas rechuté. Elle avait trouvé un nouveau copain, Reg, un cinéaste clean et cool, qui l'aimait sincèrement. Mais avec qui elle s'ennuyait. Elle pouvait aussi compter sur Christina, le médecin qui avait accepté de la suivre en particulier, à domicile, presque de la coacher tant cliniquement que psychologiquement. Elle était censée composer un troisième album, où elle aurait soldé son histoire avec Blake, pour prendre un nouveau départ. On sait ce qu'il en advint.

Bien sûr, outre le rôle dévastateur de Blake, on cherche des explications "logiques" à cette déchéance, à ce destin fatal, dans la grande tradition des pops stars disparues en pleine jeunesse : Janis Joplin, Jim Morrison, Jimi Hendrix, Kurt Cobain et d'autres. Fragilité psychologique - toute gamine, Amy était déjà dépressive - ; dislocation de la cellule familiale ; rôle plus qu'ambigu du père, Mitch, une espèce de faisan. Rien de cela ne suffit, bien sûr. Il y a autre chose, un mystère que seule Amy aurait pu élucider. "Si je mourais demain, avait-elle déclaré à la sortie de son premier album, Frank, je serais quand même satisfaite, d'unecertaine façon. » Parce que sa musique a été écoutée par la planète entière, et qu'on ne l'oubliera pas. Pauvre consolation pour cette artiste au grand coeur qui aurait pu prétendre à égaler les plus grands. Elle était hélas trop "hardcore », selon le mot de son copain Pete Doherty, expert en la matière.

Amy Winehouse, à 27 ans, a fait son entrée dans la légende. Busty, journaliste à Rock& Folk depuis 2004, y ajoute sa contribution très personnelle.

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