Les avocats signataires s'interrogent en préambule de leur appel: "Alors que la France s’est récemment mobilisée pour la liberté d'expression, comment pourrait elle laisser un écrivain risquer la prison pour ses déclarations publiques ?"
Il expriment en tant que lecteurs leur "solidarité avec Erri De Luca." "En citoyens du monde, nous demandons aux États français et italiens de faire retirer cette plainte d’une société dont ils sont aujourd’hui les seuls actionnaires. En défenseurs de la liberté d’expression, nous n’acceptons pas qu’un écrivain soit poursuivi pour ses mots" ajoutent-ils.
Cet appel s'ajoute à celui des cinéastes européens, qui a rassemblé 65 signatures, et celui de personnalités de la culture, qui a réunit 86 noms. Au total, depuis le premier appel lancé par Jean-Marc Salmon le 1er mars, ce sont plus de 600 artistes, intellectuels, journalistes, écrivains, élus - auxquels s'est ajoutée cette semaine Martine Aubry, maire de Lille et ancienne ministre - issus de 21 pays qui ont demandé le retrait de la plainte de l'entreprise publique franco-italienne contre l'auteur italien. Une pétition citoyenne a rassemblé plus de 6300 noms.
Au nom de la démocratie et de la liberté d'expression
Tous défendent "le droit d’Erri De Luca de dire que le projet de ligne Lyon-Turin "doit être sabotée". L’écrivain a toujours soutenu qu’il parlait au figuré. Si les hauts fonctionnaires du TGV comprirent cette phrase au sens littéral, qu’y pouvait-il ? En artisan des mots, il eut à cœur de s’en expliquer dans un livre publié dans une dizaine de pays, et en France par les éditions Gallimard, La Parole contraire. En vain." Et de rappeler que François Hollande, président de la République, avait déclaré au dernier Salon du livre de Paris que les auteurs "ne doivent pas être poursuivis pour leurs textes".
Le comité de soutien français a demandé, il y a deux semaines, à être reçu, avec l’écrivain, par le président de la République "afin, que la France ne soit pas à l’origine de la condamnation d’un écrivain pour des mots qu’il a prononcés." Aucune réponse n'est venue de l'Elysée.
La dernière audience du procès de l'écrivain italien a lieu lundi 19 octobre. Erri De Luca risque huit mois de prison. Comme Fabrice Piault, rédacteur en chef de Livres Hebdo l'a écrit dans son éditorial du n° 1058 daté du vendredi 16 octobre, ce jugement "constituera un nouveau test de la capacité des démocraties à résister aux tentations d’un durcissement qui finirait par se retourner contre elles."
Lundi 12 octobre, lors d’une soirée de soutien à Erri De Luca, le président du Centre national du livre, Vincent Monadé a rappelé que "la liberté d’expression n’est pas à géométrie variable".