Le poète et militant du Hirak (mouvement populaire pour l'instauration d'une démocratie) Mohamed Tadjadit a été de nouveau arrêté, fin août, par les services de sécurité algérien. C'est le Comité national pour la libération des détenus (CNLD) qui a annoncé son arrestation à Ain Taya, ainsi que la perquisition qui a eu lieu à son domicile familial de Tadjadit. Créée pendant le soulèvement populaire, le 26 août 2019, le CNLD milite pour la libération des prisonniers politiques et d'opinion. Au 8 février 2020, l'association a dénombré 1345 cas de poursuites judiciaires à l'encontre des manifestants du Hirak.
Le jeune homme de 26 ans s'est fait connaître à travers ses poèmes en faveur de la liberté d'expression. Le surnom de "poète du Hirak" lui a ainsi été attribué. Accusé "d’atteinte à l’unité nationale", il avait écopé d’une peine exemplaire de 18 mois de prison ferme et d'une amende de 100000 dinars (66 euros), le 19 décembre dernier. En liberté provisoire depuis le 2 janvier, il avait continué d'écrire et de partager ses textes. Actuellement, il a entamé, avec son coaccusé Khimoud Nourredine, une grève de la faim en protestation à dix chefs d’accusation qui leur ont été signifiés.
Des intimidations subies depuis des semaines
Le Pen Club français a apporté son soutien à Mohamed Tadjadit. L'association promeut la liberté d’expression et de création, et défend les droits des écrivains, journalistes, éditeurs et traducteurs menacés ou emprisonnés. Sur le site du Pen Club, on peut lire des détails sur les conditions de vie du poète, avant son arrestation : "Depuis quelques mois, il vivait en clandestinité et se déplaçait dans plusieurs villes du pays où il était reçu par la population, suite à une tentative d’enlèvement dans son quartier où se trouve la maison parentale ; encerclé, il avait pu s’exfiltrer grâce à l’aide de voisins et d’amis. À son dernier retour à Alger, le 21 août, il a été à nouveau encerclé avec un certain nombre de ses amis dans une maison de la casbah d’Alger ; réfugiés sur la terrasse d’une maison pendant des heures, ils ont pu sortir et s’échapper ce jour-là". L'association a également publié une traduction d'un de ces poèmes :
Suppression du régime militaire
et chute de l’État mafieux
le peuple libre ne se cassera point
jusqu’à ce qu’il voie son pays purifié
celui rempli par des visages de malheur.
Ô ! mon pays, tu te souviens
de tes enfants mangés par la mer
le combattant en toi a été trahi.
Moi je me souviens
ils ont tous mangé et pris
que ça soit les partants ou les arrivants
aucun d’eux n’est honnête
même ceux qui ont laissé la jeunesse
éteinte à l’année.
Nous avons dit « ils s’en iront tous »
eux et leur faux rouillée.
Mohamed TADJADIT