Blog

Quels que soient les enjeux commerciaux du différend entre Amazon et Hachette, le bras de fer auquel nous assistons, qui se traduit par la proposition d’acheter tel livre plutôt que tel autre, me semble dénoter de la part d’Amazon une triple erreur d’analyse.

Premièrement, il renvoie à la question de la « nature » du livre, qu’il soit papier ou bien numérique : le livre est caractérisé par son unicité ; chaque titre est différent des autres, et la substituabilité apparait comme un non-sens. Proposer au lecteur un titre d’un éditeur hors Hachette plutôt qu’un titre édité par Hachette relève de la dénégation de cette caractéristique essentielle qui fonde toute l’originalité de l’économie du livre.

Deuxièmement, la force de frappe d’Amazon repose sur un double avantage : la richesse du fonds et sa disponibilité d’une part, et la qualité des recommandations d’autre part. Dans cette affaire, Amazon envoie le message à peine subliminal que l’on peut passer impunément, au prétexte d’un différend avec un éditeur, de la recommandation ciblée sur les seuls goûts du consommateur à la recommandation ciblée conjointement sur les goûts en question et sur les intérêts économiques d’Amazon.

Troisièmement, les auteurs sont dans l’affaire les otages médusés d’un différend qui les dépasse. Alors que le géant Amazon se positionne comme éditeur, n’est ce pas courir un sacré risque que de se mettre à dos un monde de gens collectivement peu revendicatifs (peu de chances qu’ils descendent dans la rue…), mais tous sourcilleux quand il s’agit de défendre leur liberté d’écrire et leur souhait non pas seulement d’être publiés, mais d’être commercialisés et équitablement traités par les réseaux de distribution et de diffusion.

Les dernières
actualités