En droit français, les opérateurs du marché du livre sont tenus par la loi sur le prix unique. Mais il leur faut de plus éviter la revente à perte. Celle-ci est en effet visée à l’article 32 de l’ordonnance du 1 er décembre 1986. La revente à perte est décelée par rapport au « prix d’achat effectif ». La jurisprudence a pris soin de définir avec précision les concepts tant de prix d’achat que de prix de vente. La cessation ou le changement d’activité, ainsi que l’alignement sur la concurrence, permettent toutefois, par exception, de revendre sous cette forme. En outre, le législateur français a cru bon de préciser que la publicité des reventes à perte est elle-même interdite. En revanche, le 11 mai 2005, une directive européenne «  relative aux pratiques commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des consommateurs  » est venue conforter les pays de l’Union ayant autorisé les reventes à perte. Elle s’oppose à toute disposition nationale «  qui prévoit une interdiction générale d’offrir à la vente ou de vendre des biens à perte, pour autant que cette disposition poursuit des finalités tenant à la protection des consommateurs.  » Mais la Cour de justice de l'Union européenne  vient de rendre une décision, le 7 mars 2013, qui pourrait aboutir à l’interdiction… de l'interdiction de la revente à perte.  C’est le secteur belge de la distribution d’appareils photos qui était soumis à l’examen des juges européens. Une question préjudicielle émanant du Tribunal de Grand a entraîné les juges européens à se prononcer sur la compatibilité de la législation belge avec la directive de 2005. Ce texte tend en effet vers une harmonisation des législations en matière de pratiques commerciales déloyales, afin de favoriser le commerce au sein de l’Union tout en assurant en un «  niveau élevé de protection des consommateurs  ». Or, la revente à perte n’y est certes pas mentionnée comme une des pratiques « réputées déloyales en toutes circonstances mais peut faire l’objet d’un examen critique en justice ; ce qui a été le cas. Une interdiction générale de la revente à perte serait elle-même interdite «  pour autant que cette disposition poursuit des finalités tenant à la protection des consommateurs  ».  Le droit français qui a pris pour principe l’interdiction de la revente à perte pourrait donc à terme être chamboulé par cette décision récente et de portée très large. Rappelons enfin qu’i l existe également, en droit français, une notion de « prix abusivement bas » – instaurée par la loi dite «Galland» du 1 er juillet 1996 et inscrite elle aussi à l’article 10-1 de l’ordonnance du 1 er décembre 1986. Mais elle ne concerne que ceux qui offrent directement aux consommateurs des produits dont les prix sont fixés anormalement bas, parce qu’ils les fabriquent eux-mêmes avant de les revendre. Il s’agit là essentiellement du cas des vendeurs de pizzas… Mais le « livre à la carte » se verra peut-être un jour appliquer ces nouvelles dispositions…
15.10 2013

Les dernières
actualités