Valérie Pécresse a précisé, lundi 21 mars au théâtre de La Bruyère (Paris 9e), ses ambitions culturelles. Dans son programme, elle indique déjà vouloir "instaurer un taux réduit de TVA (5,5 %) sur tous les biens culturels" et "valoriser les musées et le label Maison des Illustres" en région. Ce label est décerné à 244 établissements dont certains sont directement liés à des autrices et auteurs comme le Château de Ferney-Voltaire dans l’Ain, la maison natale de Colette dans l’Yonne ou encore celle de Victor Hugo dans le Doubs.
Sur la scène du théâtre de La Bruyère, elle l’affirme : "Chaque Français […] doit avoir accès à la culture". En préambule, elle rappelle par ailleurs que "la culture, c’est aussi de l’emploi, c’est aussi 1,3 million emplois directs et indirects. Ces emplois, il faut évidemment les préserver. Il faut que nos artistes puissent vivre de leur art". La candidate LR estime qu’il "nous faut un sursaut culturel assis sur quatre piliers" : la démocratisation, la transmission, la création et le rayonnement.
Un ministère de la Culture "fort" pour Valérie Pécresse
La candidate LR veut faire de l’éducation artistique et culturelle (EAC) une "Grande cause nationale" et tripler son budget. Elle annonce également vouloir créer des clubs de lecture dans les écoles, tout comme des clubs de théâtre ou de cinéma. "Je prendrai le Pass Culture d’Emmanuel Macron, dont tout le monde sait aujourd’hui que c’est devenu un pass manga", déclare-t-elle par ailleurs. Pour Valérie Pécresse, il n’est pas question de priver les libraires de l’apport du Pass Culture mais souhaite l’"évaluer, voir ce qui a marché, ce qu’il faut garder". Elle veut le "compléter" d’un "chèque d’éducation artistique et culturelle", ouvert à "chaque enfant de France, dès le plus jeune âge", qui profiterait davantage "au spectacle vivant, aux musées et aux concerts". Dénonçant une "vision marchande" du Pass Culture, elle n’indique toutefois pas le montant alloué à ce chèque annuel, se contentant de dire qu’il s’agira d’un "droit" alloué aux enfants.
Si elle mise sur l’éducation artistique et culturelle, Valérie Pécresse ne souhaite pas pour autant fondre le ministère de la Culture dans celui de l’Education. Elle veut un ministère de la Culture "fort" et "stratège" qui ne soit pas "juste un tiroir caisse" mais qui aurait, au contraire, une mission de "diffuser l’art partout et de permettre que tout le territoire soit irrigué par la culture". Elle annonce ainsi vouloir "sanctuariser" le budget de la culture "à 4 milliards d’euros par an" et construire des politiques culturelles en collaboration étroite "entre l’Etat, les régions et les collectivités".
Pour faire rayonner l’art et la culture, Valérie Pécresse veut "imposer aux Centres nationaux du cinéma, de la musique et du livre de financer 10 % des œuvres francophones d’artistes et d’auteurs non Français". Elle cite alors comme exemple l’auteur sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, lauréat du Goncourt 2021 pour La plus secrète mémoire des hommes (Philippe Rey), accueilli en résidence d’artistes en Ile-de-France, région dont elle est la présidente.
Les ambitions de Nicolas Dupont-Aignan pour le livre
Afin de permettre aux candidates et candidats de préciser leurs ambitions pour le livre, Livres Hebdo leur a envoyé un questionnaire. Seul répondant à nos questions, Nicolas Dupont-Aignan veut « donner au livre une place de premier ordre » dans sa politique s’il est élu à la présidence de la République. Il indique vouloir "redorer le blason du ministère de la Culture" en lui "donnant notamment les moyens d’une politique du livre ambitieuse : nous devons stimuler la création littéraire, notamment en modernisant le cadre légal du droit d’auteur et en adoptant des incitations fiscale et des mesures administratives favorables à l’industrie de l’édition". Il affirme par ailleurs sa volonté de "démocratiser l’accès à la lecture en incitant par des mesures fiscales l’ouverture de librairies dans les territoires peu dotés et financer de grandes campagnes de promotion de la lecture. Je souhaite également augmenter les fonds de livres audio et des livres en braille dans les bibliothèques et médiathèques".
S’il assure accorder "une attention particulière à l’évolution des relations éditeurs-auteurs", le candidat de Debout La France estime toutefois que "toute la difficulté est de savoir comment répondre à ces légitimes revendications sans déséquilibrer le marché de l’édition, car elles sont parfois difficilement conciliables avec la logique économique des maisons".
Et alors qu’une étude du Centre national du livre (CNL), réalisée par Ipsos et dévoilée le 23 mars, pointe que les jeunes lecteurs "décrochent fortement à partir de l’entrée au collège, se tournant plus volontiers vers les écrans", Nicolas Dupont-Aignan assure vouloir lutter contre ce phénomène. "Une campagne de sensibilisation doit être organisée en coordination avec le Ministère de la Culture, le Ministère de l’Education Nationale et le Ministère du Numérique pour alerter la population, notamment les parents, mais aussi les enfants et les jeunes, sur les dangers liés à l’exposition excessive aux écrans et aux réseaux sociaux, afin d’encourager le développement d’un usage responsable des outils numériques, nous répond-il. A cet égard, il est urgent de faire appliquer l’interdiction de l’utilisation des téléphones portables qui date de 2018 et qui n’est pas respectée. C’est la condition sine qua non pour que la promotion du livre puisse rencontrer un écho favorable dans la population".
Un "culturomètre" pour la Ligue des auteurs professionnels
Enfin, la Ligue des auteurs professionnels a mis en ligne, mardi 22 mars, son "culturomètre" afin de mesurer la "place des artistes-auteurs et de la culture" au sein de la campagne présidentielle. Ce baromètre est établi selon plusieurs critères d’analyse, reprenant les cinq axes définis en octobre dernier par le syndicat dans ses 30 propositions pour "offrir un avenir à la création". Les candidates et candidats y sont classés dans quatre catégories, allant du vert au rouge.
Avec des programmes culturels détaillés, Fabien Roussel, Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot se placent sans surprise dans la catégorie des candidats ayant de "nombreuses mesures pour la culture et les artistes-auteurs". Pour rappel, le candidat communiste veut doter les artistes-auteurs d’un "authentique statut, plus protecteur et garantissant effectivement leurs droits sociaux et leurs rémunérations".
Le candidat de La France Insoumise reprend quelques recommandations formulées par Bruno Racine dans son rapport "L’auteur et l’acte de création", publié en janvier 2020. Il souhaite ainsi "créer un Centre national des artistes-auteur·ices qui organisera des élections professionnelles pour négocier et mettre en place une protection sociale adaptée à ces professions". Le livret "Arts et culture : pour un service public du progrès humai" de Jean-Luc Mélenchon a d’ailleurs été officiellement présenté le 18 mars en compagnie de Laurent Binet, Goncourt du premier roman 2010 pour HHhH (Grasset). Et de son côté, Yannick Jadot a indiqué dans son programme vouloir "soutenir les artistes-auteurs" en mettant notamment en place un "revenu garanti".
A l’inverse, et sans proposition concrète pour la culture et le livre, Nathalie Arthaud et Marine Le Pen obtiennent un carton rouge au sein du "culturomètre" de la Ligue des auteurs professionnels.