19 mai > Essai Etats-Unis

John Dewey (1859-1952) - rien à voir avec son homonyme Melvil Dewey, connu des bibliothécaires - est une figure majeure du pragmatisme. Parmi les œuvres de ce psychologue et philosophe américain traduites en français, on compte des études sur l’éducation, la culture et la morale. Les essais réunis en 1910 sous le titre L’influence de Darwin sur la philosophie et publiés ici pour la première fois démontrent le caractère obsolète et inadapté du bagage intellectuel humain dans le post-darwinien. Autrement dit, après Darwin, on ne peut plus penser pareil.

Pour Dewey, la parution en 1859 de L’origine des espèces marque un tournant dans notre approche du monde et de nous-mêmes. Puisque la Nature n’a pas d’autre dessein que celui de se préserver, nous ne pouvons pas compter seulement sur le hasard pour expliquer le monde. Tout simplement parce que nous en sommes aussi les dépositaires. Dewey y voit une autre logique qui introduit un élément nouveau dans la vie intellectuelle : l’obligation à l’égard des autres. "Contraire à la modestie, la philosophie y gagne en responsabilité." Platon, Aristote ou Kant sont ainsi renvoyés à leur scolastique. Pour Dewey, il faut du concret, du solide, à l’image de la théorie de l’évolution.

"Il faudrait allier l’imprudence du prophète à l’entêtement du partisan pour risquer un exposé systématique de l’influence de la méthode darwinienne sur la philosophie." Dewey reste donc raisonnable. "A la fin, les hommes font ce qu’ils peuvent faire." Dans ses onze essais constitués d’articles ou de dialogues, il aborde avec beaucoup plus de clarté que ses commentateurs les thèmes de la connaissance, de la vérité et de la morale pour introduire un principe de responsabilité dans la vie intellectuelle. Manifestement, un bon siècle plus tard, le message ne semble pas être passé chez tous les penseurs. L. L.

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