Margaret Drabble débarque chez Christian Bourgois avec Un bébé d’or pur, son dix-huitième roman. Opus où elle s’intéresse, comme elle l’explique, "à l’idée de l’innocence, l’idée qu’une personne soit incapable de faire le mal, car pour la plupart nous sommes assaillis de pensées malveillantes".

L’Anglaise, née à Sheffield en 1939, met en scène Jessica Speight. Celle-ci est originaire d’une ville industrielle des Midlands et a pour père un "homme déçu aux opinions tranchées", mais bon et généreux. Avec d’autres anthropologues, elle s’est rendue en Afrique centrale et y a croisé des petits enfants aux orteils atrophiés, "enfants aux pinces de homard".

Plus tard, Jess a accouché d’un bébé pas comme les autres. Anna a d’emblée été une petite fille souriante, un "bébé d’or pur" comme l’écrit Sylvia Plath dans un fameux poème. Gamine sage et en bonne santé, Anna souffre pourtant de difficultés d’apprentissage "pas manifestes à l’œil nu, ce qui ést à la fois une bénédiction et un fléau". Elle manque de coordination, est souvent maladroite.

L’histoire de Jess et d’Anna est contée par une bonne amie du quartier, une enclave populaire au nord de la ville. Une femme dont on apprendra fugacement le prénom, mère de deux garçons et employée à mi-temps. La narratrice de Mrs Drabble peint une Jess qui élève seule sa fille - le père est un homme marié qui fut son professeur à l’époque de l’université - avant que n’entre dans sa vie un photographe américain, Bob. Une Jess qui évolue dans les années 1960 puis 1970, peaufine une thèse sur "les perceptions contrastées de la sorcellerie et du handicap dans l’Afrique pré-impériale et post impériale" et concocte d’étonnants plats.

L’auteure de La voie radieuse (Stock, 1988, repris en "Libretto") et de La sorcière d’Exmoor (Phébus, 2002, repris en "Libretto") déploie toute sa finesse psychologique dans le portrait d’une époque en pleine mutation et dans celui d’une héroïne qui ne lâche jamais prise et ne cesse de se battre face aux aléas de la vie.

Al. F.