Partir sans laisser d'adresse, disparaître et s'évanouir dans la nature mais aussi trahir en fuyant, le narrateur de L'eau qui dort, le sixième roman d'Hélène Gestern depuis Eux sur la photo (Arléa, 2011), connaît bien ce geste radical : il a été celui qu'on abandonne et celui qui déserte. Comment de chaque côté d'un même acte, s'arrange-t-on avec le passé, négocie-t-on avec l'angoisse, le remords ? Et dans quel coin de sa nouvelle vie remise-t-on ceux qu'on a laissés derrière soi ?
Benoît Lauzanne, 46 ans, aurait voulu être jardinier ou garde-forestier mais il est devenu représentant en papiers de luxe. Son mariage avec Sabine, photographe frustrée, est en faillite, puis il est licencié et, sur un coup de tête, il quitte sans explications le domicile conjugal parisien. Au buffet de la gare d'une petite ville de province, il croit reconnaître Irina, une artiste peintre lituanienne, le grand amour de sa jeunesse, qui l'a quitté brutalement un matin et dont il n'a plus jamais eu de nouvelles. Sous le choc de ce hasard bouleversant qui rompt les digues des souvenirs refoulés, il se fait embaucher comme ouvrier horticole dans le domaine d'une veuve qui a aménagé un parc « classé site patrimonial ». Là, il trouve auprès des arbres et des plantes une forme d'apaisement tout en continuant à pister la femme à peine entrevue. Jusqu'à ce qu'une insolite découverte dans la propriété vienne très habilement mêler à cette quête intime une enquête policière. « Disparaître, c'est mourir aux autres mais aussi à
soi. » Pour renaître ?
L’eau qui dort
Arléa
Tirage: 5 000 ex.
Prix: 22 euros ; 384 p.
ISBN: 978-2-36308-171-1