Militante historique du féminisme français, Antoinette Fouque, co-fondatrice du Mouvement de libération des femmes (MLF), est décédée dans la nuit de mercredi à jeudi à Paris à l'âge de 77 ans, ont annoncé vendredi soir "ses amies du MLF".
"Une grande figure du féminime s'est éteinte", a déploré samedi matin le président François Hollande dans un hommage à cette "inlassable militante (qui) n'a jamais cessé de défendre l'émancipation des femmes". "Elle a porté ses convictions en Europe et dans le Monde", a poursuivi le chef de l'Etat dans un communiqué.
Editrice et essayiste
Antoinette Fouque a créé en 1973 et dirigé les éditions des Femmes. La maison d’édition, installée rue Jacob dans le 6e arrondissement de Paris, s’est agrandie avec un espace solidaire dédié aux femmes, une librairie avec pignon sur rue et une galerie d’art. Au sein de la maison d’édition, elle a aussi créé la collection littéraire « Bibliothèque des voix », première collection de livres audio en France. Dans cette collection, on retrouve notamment Vivre l'histoire (2004), qui rassemble les entretiens de Fouque avec Simone Veil.
Antoinette Fouque a écrit et édité Catherine Deneuve : portraits choisis (1993), en collaboration avec le journaliste Jean-Pierre Lavoignat, Il y a deux sexes : essai de féminologie (1995), Le bon plaisir (2006), Gravidanza : féminologie II (2007) et III (2012), et en novembre dernier le Dictionnaire universel des créatrices. Le 13 mars, les éditions des Femmes ont prévu de sortir l’enregistrement de cinq entretiens diffusés sur France Culture dans l’émission de Virginie Bloch-Lainé du 7 au 11 janvier 2013 el livre audio : Antoinette Fouque : à voix nue.
Signalons également Qui êtes-vous, Antoinette Fouque ? : entretiens avec Christophe Bourseiller, paru en 2009 aux éditions Nouvelles François Bourin.
Critique littéraire
Née Grugnardi, le 1er octobre 1936 à Marseille, (Bouches-du-Rhône), Antoinette Fouque, diplômée d'études supérieures de lettres et docteur en sciences politiques, fut d'abord enseignante (1961), et parallèlement, à partir de 1964, critique littéraire et traductrice, notamment aux Cahiers du Sud et à La Quinzaine littéraire. Elle fut également lectrice aux éditions du Seuil.
Antoinette Fouque avait cofondé le MLF avec Monique Wittig et Josiane Chanel, un événement qu'elle faisait remonter à une soirée d'octobre 1968, dans la foulée de Mai 68, "en réaction contre le virilisme du mouvement étudiant" et qui avait constitué pour elle "une libération joyeuse", avait-elle expliqué dans un entretien au site internet Au Féminin. Une date et un rôle parfois contestés par d'autres historiques du féminisme pour lesquelles le Mouvement a véritablement pris corps en août 1970.
Au sein du MLF, cette ancienne étudiante de Roland Barthes, qui suivit une psychanalyse avec Jacques Lacan, fonde et anime le groupe "Psychanalyse et Politique". Dans les années 90, cette théoricienne du féminisme, aux positions parfois controversées, s'est engagée nettement sur le terrain politique.
Députée européenne
Chargée de mission auprès de Michèle André, secrétaire d'Etat aux Droits des femmes en 1990, elle fonde deux ans plus tard le club Parité 2000, avant d'être élue au Parlement européen en 1994 (jusqu'en 1999), sur la liste "Energie radicale" de son compatriote marseillais Bernard Tapie.
A Strasbourg, elle sera vice-présidente de la commission des Droits de la femme, et déléguée de l'UE à la conférence mondiale des femmes à Pékin (Chine) en 1995. Parallèlement, elle est chargée de séminaires en sciences politiques et directrice de recherches à l'université de Paris-VIII Saint-Denis.
Antoinette Fouque était Commandeur de la Légion d'honneur, grand officier de l'ordre national du Mérite, commandeur des Arts et des Lettres.