"J’ai tellement travaillé pour cela, impossible de faire autrement. Et au premier jour du déconfinement, j’ouvrirai en grand", lance Mathilde Degroult. Celle qui, en dix ans de librairie n’avait jamais pensé créer sa propre structure est plus déterminée que jamais à lancer ses Racontars (Saint-Lô). Initialement programmée le 3 novembre, l’ouverture de la seule librairie généraliste indépendante de la ville (100 m2, 6000 références) s’est faite par le biais du numérique.
"Pour commencer, j’ai envoyé un mail expliquant les modalités du click and collect aux 388 contributeurs qui ont participé au financement participatif de la librairie auxquels s’ajoutent tous les potentiels clients qui m’ont découvert par Facebook", explique la libraire. La communication se poursuit sur les réseaux sociaux avec une sélection de coups de cœur et de classiques.
Mathilde Degroult s’est également rapprochée, plus vite que prévu, de la plateforme Leslibraires.fr. Et pour parachever le dispositif, elle tient une permanence à la libraire "du mardi au samedi, de 10 à 19h. Mais ça marche. Les gens sont adorables. En une matinée, j’ai réceptionné quasiment 80 commandes", s’enthousiasme la toute jeune patronne.
Des clients en deuil
Même son de cloche, et même dispositif, dans le 15e arrondissement de Paris. Fermée pendant quasiment un an dans l’espoir d’une reprise, l’Attrape-cœurs rouvre ses portes rue Lourmel le 6 novembre. "Les clients étaient en deuil, on sentait un réel manque dans le quartier, on ne pouvait pas faire autrement que tenir cette date même si l’ouverture se fait dans des conditions dégradées", soutient le nouveau directeur, Philippe Guazzo. Recruté par Sylvie Loriquer et Erika Menu, qui restent propriétaires de la librairie qu’elles ont ouverte en 2012, l’ancien salarié du Comptoir des mots sera accompagné de Raphaëlle Tréhet pour reconquérir les clients et retrouver le chiffre d’affaires moyen de la succursale, 400 000 euros.
Dans l'urgence
Un peu plus à l’est, dans le 19e arrondissement, les Vignettes, centrée autour de l’image, a choisi d’avancer son lever de rideau, prévu le 2 novembre, au jeudi 29 octobre, dernier jour avant le reconfinement. "C’était un peu dans l’urgence mais nous voulions montrer la librairie au quartier avant de la dissimuler à nouveau", indique Ariane Roland, l’une des quatre associées à l’origine du projet.
Proposant 8500 références en bandes dessinées et en livres illustrés pour la jeunesse sur 77 m2, Vignettes a donc basculé, après une journée record, dans le fonctionnement click and collect et a installé, elle aussi, une table devant la porte pour assurer les retraits. Depuis, les commandes restent soutenues, la librairie enregistrant entre 50 et 80 tickets par jour. "Cela confirme l’attente qui existait dans le quartier vis-à-vis d’une telle offre, totalement absente", se réjouit Ariane Roland, qui, avec ses trois associés, tous libraires de métier, reste optimiste quant à la réalisation du CA prévisionnel fixé à 500 000 euros.