Les moyens juridiques : Droits d'auteur et contrats d'édition
Les politiques du livre se rassemblent autour de lois, qui réglementent les droits et les obligations de l’État et des individus. Elles influencent le secteur éditorial à travers 4 principes. Le premier, la liberté d’expression, offre une opportunité légale pour les auteurs, qui est généralement inscrite dans la Constitution.
Au niveau international, elle est avant tout régie par la déclaration universelle des Droits de l’Homme et son article 19, qui stipule : « Tout individu a droit à la liberté d'opinion et d'expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d'expression que ce soit. »
Le droit d’auteur est aussi un soutien cruciale pour les auteurs. Considéré comme l'outil juridique le plus important pour le développement littéraire, ce dernier est inscrit dans plusieurs constitutions nationales. Le rapport de l'UIE distingue les deux formes du droit d’auteur : d’une part, celui dominant, soit le modèle anglo-américain dit lois communes, d'autre part, souvent en Europe, avec le droit civil. Dans le premier, les considérations économiques sont fondamentales et mettent l'accent sur le droit d'auteur comme principe le plus important. Tandis que dans le second, qui est souvent identifié comme un code des droits d'auteur, a pour base le droit moral. La loi sur le droit d'auteur accorde à l'auteur des droits exclusifs sur ses créations pendant une période limitée, notamment après la mort de celui-ci.
Les auteurs sont aussi protégés par un autre outil, celui du contrat avec les éditeurs. Les auteurs, les éditeurs et les libraires fonctionnent selon des principes juridiques nationaux et internationaux. Dans le contrat, l’auteur cède ses droits de reproduction et de distribution. Cependant, il n'existe pas de réglementation internationale sur la manière dont les contrats peuvent être établis entre les auteurs et les éditeurs, ni d'ailleurs entre les éditeurs et les libraires. Pour soutenir les auteurs, l’UIE privilégie que « les contrats d'édition soient toujours être écrits » pour « assurer une relation équilibrée entre les éditeurs et auteurs ».
Le rapport de l’UIE aborde les aides légales pour les auteurs, notamment celui des régimes de droit de prêt public (DPP), qui sont réglementés par la législation et qui, dans de nombreux cas, sont liés aux droits des auteurs. Ils ont été créés afin d'indemniser les auteurs pour la libre utilisation de leurs œuvres dans les bibliothèques. Les régimes de DPP existent dans 35 pays, la plupart en Europe. En dehors de l'Europe, les seuls pays qui ont introduit le DPP sont l'Australie, le Canada, Israël et la Nouvelle-Zélande.
Une aide économique pour les auteurs et les éditeurs
Les politiques du livre permettent aussi d’aider le secteur au niveau économique. Le rapport choisit plusieurs exemples typiques, comme les programmes de soutien et de réglementation, qui permettent à l’État d’accorder certains avantages économiques à une entreprise. Son exemple le plus notable est l'exonération de la TVA dont peuvent bénéficier libraires, éditeurs et acheteurs de livres dans de nombreux pays. Cependant au sein de certains pays, comme en Afrique, ils sont taxés et souvent soumis à des droits d'importation, ce qui freine l'accès au livre.
Les deux chercheurs, auteurs du rapport, Helge Ronning et Tore Slaata, proposent une alternative. Elle consiste à accorder aux auteurs des déductions étendues sur leur revenu imposable. La politique commerciale commune était présente dans l'Europe de l'après-guerre. Aujourd’hui, au sein de l'UE, ces outils sont considérés comme faussant la concurrence.
Par conséquent, pour défendre les régimes de soutien économique dans l'UE, les domaines littéraires doivent être définis comme des outils de politique culturelle plutôt que des outils de la politique des entreprises. C'est le cas avec les régimes de prix fixe du livre, adoptés dans quelques pays, dont la France en 1981, et les lois européennes sur le livre, qui limitent la capacité des libraires de s'écarter d'un prix que les éditeurs ont fixé pour une période statutaire.
Pédagogie et manuels pour l'apprentissage de la lecture
La troisième catégorie de mesures politiques prévoit les outils pédagogiques. Les nombreuses lois sur l'éducation du monde entier sont d'une importance primordiale, car elles exigent généralement de l'État qu'il fournisse une éducation adéquate à tous les enfants.
Les lois peuvent spécifier l'utilisation de manuels et d'aides pédagogiques qui sont disponibles dans les langues nationales. Les outils purement éducatifs sont souvent au cœur des campagnes pour la lecture. Il s'agit de donner aux auteurs l’occasion de lancer des initiatives dans les écoles pour faciliter la lecture à des groupes de lecteurs sélectionnés, en particulier les enfants et les adolescents. Depuis 1995, l'UNESCO a lancé la Journée du livre et du droit d'auteur, qui se déroule le 23 avril. L’évènement annuel permet de promouvoir des habitudes de lecture et de proposer des initiatives politiques en matière de livres dans le monde entier.
Le rapport met en avant l’un des outils pédagogiques les plus importants, les manuels scolaires. Ils sont le matériel de base dans les écoles et sont fondamentaux pour l’éducation des enfants. Constamment renouvelés, les livres changent et suivent les époques. Avec l’arrivée du numérique, les formats des manuels ont été changés. Depuis 2015, la Corée du Sud a met a disposition tout le matériel pédagogique sur les plateformes numériques.
L’UIE invite les états à fournir de nouveaux outils, qui garantissent une bonne capacité de lecture et d'écriture. La rapide évolution de l'environnement technologique dans l'éducation présente des défis pour les éditeurs, qui tentent de trouver le meilleur moyen d'utiliser les avantages des technologies du papier et de l'écran pour l'éducation, quels que soient les groupes d'âge et les établissements d'enseignement.
La librairie au centre des infrastructures
Le rapport de l’UIE élargit les politiques du livre vers un quatrième outil : Les infrastructures. Elles permettent d’accéder au livre et de le rendre disponible au plus grand nombre. Au fil des années, les distributeurs et les libraires ont contribués à une meilleure accessibilité, par exemple avec un service de livraison et un service postal.
Pour soutenir le livre, La Chine a mis en place une politique nationale pour les librairies, avec succès. La Chine comptait 225000 librairies et points de vente pour les livres à la fin de 2018, soit une hausse de 4,3 points par rapport à l'année précédente. La franchise Yanjiyou a ainsi ouvert 53 librairies entre janvier et novembre et Sisyphe a également 85 établissements dans la même année.
Le soutien aux librairies existe également en Suède. Un régime de subvention a été introduit en 1985 afin d'améliorer la capacité des librairies à distribuer un plus large éventail de titres et à maintenir en vie les librairies dans tout le pays.
Toutefois, l’UIE met en garde les établissements culturels. A l’avenir, le nombre de librairies physiques dans le monde devrait diminuer, car les ventes en ligne deviennent de plus en plus attrayantes pour les acheteurs et les lecteurs. Néanmoins, les deux chercheurs préconisent la survie du livre en format papier : « Le livre doit encore exister, et de préférence sous forme de livre relié, physique livre. »
Un avenir incertain pour le livre
Le livre conserve une très grande importance dans les sociétés contemporaines. Mais pour que cela perdure, il doit être reconnu et maintenu en vie. Pour cela il faut continuer à considérer le livre comme un produit particulier. Les états doivent ainsi apporter leur soutien à l'écriture et la littérature. Pour être suffisamment efficace, leurs politiques ne doivent pas uniquement compenser les défaillances du marché.
Elles doivent contribuer à la sauvegarde des valeurs fondamentales liées à la démocratie et au respect des droits de l'homme, ainsi qu'à promouvoir la liberté d'expression et d'information. À l'avenir, le rapport précise qu’il y aura une nécessité de renforcer la protection des langues minoritaires, de mettre davantage l'accent sur la lecture et l'écriture et d’apporter un soutien moral et économique plus fort pour le secteur de l'édition dans notre société.
Outre le maintien des compétences en lecture et en écriture comme base de toutes les formes d’éducation, le livre doit être mieux intégré dans le mouvement actuel de numérisation. Cela signifie, entre autres, que la littérature, l'écriture et la lecture doivent être considérées comme des éléments essentiels dans tous les objectifs d'apprentissage dès l'école primaire jusqu'à l'université. Et il est indispensable de publier des ouvrages dans les langues nationales.