C’est toujours la même vieille histoire : "boy meets girl". Il a 42 ans, c’est un éminent professeur en virologie animale ; elle en a 28, elle est encore étudiante. Au début bien sûr, tout va bien. C’est désir et désir d’avenir. Cela durera quelques années. Puis les feux de la passion s’apaisant, peu à peu il sera question de mariage, d’enfant à venir. Ceci fait, bien entendu, pour Edward et Ruth ce sera le début de la fin. Les amants vont se quitter, épuisés, douloureusement conscients d’être parvenus à un point de non-retour. Edward surtout voit le champ des possibles se refermer à jamais et s’interroge sur la vérité de ce qui constitue son être social : son travail. Qu’en est-il au fond du statut de la souffrance animale par rapport à celle des humains ? Il devra aller au terme de ce questionnement.
Depuis La maison engloutie (Actes Sud, 2012), immense livre trop méconnu, il ne fait pas de doute que Tommy Wieringa est le chef de file de la jeune et très riche littérature néerlandaise. Il confirme ce statut avec son cinquième livre traduit en France, ce glaçant Une femme jeune et belle, parvenant par la seule force de sa capacité d’incarnation à éviter les écueils du conte moral ou de la simple démonstration. Si les convulsions du monde ne lui sont pas étrangères, il n’en fait pas pour autant un sujet, ni de ses personnages Edward et Ruth de simples interprètes. Il est aussi le romancier de l’imposture du désir, de la relation amoureuse impossible. Résolument contemporain, sa pratique de la fiction, elle, est éternelle. O. M.