1er février > Roman France > Lenka Hornakova-Civade

Née en 1971 en République tchèque, quand le pays s’appelait encore la Tchécoslovaquie, installée en France depuis près de trente ans, Lenka Hornakova-Civade écrit en français. On avait découvert sa fougue romanesque avec Giboulées de soleil, prix Renaudot des Lycéens en 2016, qui reparaît chez Folio le 8 mars prochain, saga familiale qui retraçait un demi-siècle de l’histoire de son pays natal à travers une lignée de fières filles sans père. Ce deuxième roman qui se passe à Paris reprend le fil de l’histoire pratiquement là où le précédent l’avait laissé : on est le 21 août 1988 à la gare de l’Est, le jour des 18 ans d’Ana, au moment où elle refuse de monter dans le train qui la ramène chez ses parents, à Prague, après un séjour dans une colonie de vacances française organisée par le Parti communiste. Un sac à dos et son passeport pour tout bagage, elle rencontre une étrange femme, l’impériale Grofka, mi-magicienne, mi-sorcière, qui la prend sous son aile et lui promet de "faire son bonheur" en échange d’un vœu de silence. Grâce à cette aide miraculeuse, la jeune fille est hébergée dans l’arrière-salle d’un café de quartier à proximité du cimetière du Père- Lachaise, dont les habitués vont devenir ses protecteurs : ses trois "fées barbues", deux vieux, un Juif et un Arabe, tous deux originaires d’Algérie, et "Le Russe ", ainsi qu’un artiste tourmenté, ancien sculpteur devenu peintre, pour qui elle pose dans son atelier avec plafond de verre.

Dans une atmosphère un peu fantastique de conte contemporain (la romancière rend hommage à la fin du livre à ce genre qui l’inspire), Lenka Hornakova-Civade embrasse le petit monde d’accueil de cette jeune indocile déterminée à trouver sa liberté et suit son escorte d’"âmes cabossées" aux vies pleines de secrets. Dans Une verrière sous le ciel, on trouvera l’amour de la langue française, des interrogations sur la beauté et l’art (l’écrivaine est aussi peintre), la solidarité des réfugiés et les ombres d’une Europe centrale saisie à une date charnière de son histoire. Mais la question centrale que pose et se pose la jeune Ana est surtout : comment naître à soi-même ?

Véronique Rossignol

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