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Gonzague Steenkiste, libraire et mécène

Gonzague Steenkiste : "Mon trip, c’est de bâtir." - Photo Cécile Charonnat

Gonzague Steenkiste, libraire et mécène

A 55 ans, le propriétaire du Bateau livre, à Lille, retrouve le frisson de l’entrepreneur en aidant à la création de nouvelles librairies.

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Par Cécile Charonnat
Créé le 16.09.2016 à 01h30 ,
Mis à jour le 16.09.2016 à 10h57

Pilote depuis dix-huit ans de la librairie Le Bateau livre, à Lille, Gonzague Steenkiste se serait-il pris de passion pour l’artisanat ? Cela n’aurait rien de surprenant pour cet autodidacte, qui, à 17 ans, était attiré autant par la nature, voire l’agriculture, que par la culture, mais qui a finalement fait toute sa carrière dans les métiers du livre.

A 55 ans, il a toujours les deux pieds campés, l’un dans La Charpente, l’autre à La Forge, deux librairies indépendantes pour lesquelles il a joué le mécène. "Gérer une librairie mature comme Le Bateau livre, qui a trouvé son rythme de croisière, m’ennuie un peu, confie Gonzague Steenkiste. Mon trip, c’est de bâtir et de développer, même s’il y a beaucoup d’angoisse quand je le fais. Comme je ne me sentais plus de repartir dans des agrandissements ou des travaux au Bateau livre, j’ai trouvé le moyen de me régénérer à travers les projets des autres." A La Charpente, créée par Marie-Pierre Oslawski en 2014 à Douai, il a "juste donné un coup de main, par amitié, en apportant un peu de trésorerie". Mais à La Forge, ouverte à Marcq-en-Barœul en juin dernier (1) et inaugurée ce vendredi 16 septembre, il est carrément "support financier".

Représentant, chômeur

Pourtant, au départ, Gonzague Steenkiste ne connaissait pas Gwenaelle Bel, la porteuse du projet de La Forge. Mais, raconte le libraire, "on s’est croisés et, très vite, j’ai apprécié ses qualités entrepreneuriales. On a alors décidé de s’associer". Il crée une holding qui verse 70 000 euros au budget initial de la librairie, ce qui représente presque la moitié du plan de financement, hors aides. Sans compter l’accompagnement auprès des institutionnels et des fournisseurs, qui a permis à La Forge d’obtenir des conditions commerciales d’ouverture appréciables.

Place aux jeunes

"Cette librairie, c’est aussi un peu l’aboutissement d’un projet de jeunesse", reconnaît Gonzague Steenkiste. En 1996, à 35 ans, il se retrouve au chômage après avoir été représentant chez Interforum pour les catalogues Plon, Perrin, 10/18 et Bourgois, puis directeur adjoint de la librairie Brunet, à Douai, pendant un an et demi. "Malgré cette dernière expérience un peu douloureuse, que j’ai quittée car je n’avais aucun pouvoir de décision, j’avais toujours envie d’être libraire", se souvient Gonzague Steenkiste, qui a fait son apprentissage au Furet du nord, à Lille. Embarqué dans une formation de créateur d’entreprise, il travaille sur un projet de librairie à Marcq-en-Barœul. Mais l’affaire n’aboutit pas et, après un bref retour sur les routes pour le compte des éditions Diderot, il rachète en 1998 la minuscule librairie spécialisée jeunesse de Lille, Le Bateau livre, lui qui a "pour seule expérience en livres pour enfants le lancement du Rouergue". Chiffre d’affaires de l’époque : 1,6 million de francs. Dix-huit ans, un déménagement et des travaux d’agrandissement plus tard, "on est passé à 1,6 million d’euros de chiffre d’affaires sans une année en déficit", s’amuse le libraire.

Une réussite à laquelle il a consacré beaucoup de son temps, dont il est fier mais dont "intellectuellement" il se sentait gêné de profiter. "La société doit faire place à ses jeunes. Avec ce côté mécène, je m’applique le principe. Mais c’est aussi une manière de préparer la succession du Bateau livre", témoigne ce passionné de culture en général plus que de livre en particulier, qui aimerait prendre le large d’ici à cinq ans pour vivre toutes les autres vies qu’il a l’impression d’avoir laissées s’échapper.

(1) LH 1092 du 1.7.2016, p. 38.

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