Affaires Lindon, Gubler, Aussaresses, etc. : la Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dont le 70e anniversaire est célébré cette année, constitue l'ultime recours pour les auteurs et éditeurs des 47 pays où elle s'applique, lorsqu'ils revendiquent une liberté d'expression refusée par leurs juridictions nationales.
La Cour européenne des droits de l'homme, créée en 1959, neuf ans après l'approbation de la Convention, a élaboré une jurisprudence autour de son article 10 relatif à cette liberté d'expression. Ses arrêts accordent une grande attention aux propos et informations susceptibles de nourrir un débat d'intérêt général, compris dans un sens très large. Ils ont nuancé la frontière de la légalité tracée à plus gros trait lors de condamnations pour diffamation, violation du secret médical, apologie de crime de guerre, ou au nom du respect au droit à la vie privée, notamment lorsque des personnalités publiques sont impliquées.
La CEDH a ainsi donné tort à la France, dont la justice avait interdit le livre du Dr Gubler sur la maladie de François Mitterrand (Le Grand secret, Plon), ou qui avait condamné Paul Aussaresses et son éditeur à propos du livre (Services spéciaux, Plon) dans lequel l'ancien général justifiait la torture et les exécutions sommaires pendant la guerre d'Algérie. Mais la Cour, dans un arrêt qui a toutefois divisé ses juges, n'a pas suivi Mathieu Lindon et son éditeur (POL), à propos du roman intitulé Le Procès de Jean-Marie Le Pen (1998), jugé diffamatoire. Hervé Hugueny