A partir de la mi-avril, le sénat devrait examiner la LOPPSI. Vous avez détesté la DAVDSI, ri aux déboires de l’HADOPI, voici venu le tour de la LOPPSI. L’acronyme – qui désigne la «  loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure – est en réalité un fourre-tout qui succède à une première LOPPSI, votée il y a quatre ans. Au menu de ce mauvais  remake  : un lot d’articles relatifs à la « cybercriminalité » et aux « nouvelles technologies », voisinant    des dispositions sur les compétences de la police municipale, etc.   L’Assemblée nationale a déjà statué fin février sur cet énième texte plus liberticide qu’efficace. Le débat a été expédié  manu militari , dans tous les sens du terme. La France de l’internet aurait peur et le législateur essaye vainement de la rassurer. Quoi de neuf et de si urgent dans la LOPPSI 2  ? Côté contrefaçon en ligne, le droit français va s’enrichir d’un nouveau (et parfaitement inutile) délit visant la contrefaçon commise en ligne et en bande organisée. Rappelons que la contrefaçon est déjà largement réprimée dans le Code de la propriété intellectuelle. Et que le parlement lui-même n’a jamais jugé bon de changer un texte suffisamment clair puisqu’il sanctionne toute reproduction ou représentation d’une œuvre sans autorisation. Durant les débats , la députée (membre du Front de Gauche et ex-bibliothécaire) Martine Billard s’est indignée : « c’est bien la première fois que, dans notre droit, un délit est créé spécifiquement par rapport à un outil. Cela n’a pas de sens ! On peut comprendre que vous aggraviez la peine en cas de bande organisée, notamment pour les nouvelles escroqueries se développant sur internet. Mais il paraît invraisemblable de prévoir des circonstances aggravantes pour un délit déjà réprimé, uniquement parce qu’une personne a utilisé internet pour le commettre. » Le reste est à l’avenant. C’est ainsi qu’est désormais puni  le fait « de faire usage sur un réseau de communications électroniques, de l’identité d’un tiers ou de données de toute nature permettant de l’identifier, en vue de troubler la tranquillité de cette personne ou d’autrui. ». En bref, de commettre le délit d’usurpation d’identité inscrit dans le code pénal depuis des lustres. Le député Patrick Bloche (PS) a osé critiquer la rédaction confuse de cet article. Il a demandé en séance « si le simple fait de « taguer » la photographie d’une personne sur un réseau social sans son accord sera passible de poursuites, au motif que cela trouble « la tranquillité de cette personne ou d’autrui » ». La députée Chantal Brunel (UMP) a sorti cette réplique mémorable, sans doute liée aux mésaventures conjugales de certains présidentiables : «    des photographies ou des films datant de l’époque où des couples vivaient une relation de confiance se retrouvent ainsi sur Internet après leur séparation. Ces pratiques détruisent des personnes définitivement, ou les marquent pour leur vie entière. Je suis donc étonnée que vous demandiez la suppression d’une disposition qui permet de les réprimer. » On l’aura deviné : la LOPPSI ne pouvait pas être complète sans s’attaquer à la pédopornographie, dont chacun sait qu’elle est jusqu’ici totalement licite. Sont donc à présent prévus le blocage des sites litigieux et l’installation de chevaux de Troie virtuels par la police – habilitée ainsi à fouiller à distance dans tout ordinateur… Maintenant, c’est sûr, la France a peur.  
15.10 2013

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