8 septembre > Premier roman France

Le premier roman d’Eli Flory parle des femmes du début du XXIe. Et c’est sous la forme d’une fable en rose et noir, burlesque et tragique, que cette agrégée de lettres a choisi de poser des questions qui occupent une place centrale dans son travail. Avec la frivole Barbie on est loin des libres "scandaleuses" à qui elle a consacré La barbe d’Olympe de Gouges (Alma éditeur, 2014). La plus célèbre des poupées mannequins déprime depuis que Ken l’a quittée pour un "porn star" avec qui il a ouvert à Miami un restaurant vegan. Pour se remonter le moral, rien de tel qu’un séjour au "Diva Beach Resort & Spa Hotel" avec vue sur la Méditerranée. Là "la chirurgo-nutritionniste" gourou Justine Biebar anime des conférences sur des thèmes brûlants - "retrouver son bikini body en une semaine", "Comment conserver un ovale parfait ?" - en faisant répéter en chœur à ses disciples : "In Botox we trust."

Barbie consacre ses journées à la traque du kilo et du poil avant d’être enlevée par "l’éphèbe chargé des cours d’aqua fitness biking". Elle se retrouve captive dans un gynécée-prison de l’Etat islamique, rhabillée à la mode Daech, comme ces "sœurs" voilées qu’elle prend pour des figurantes d’un jeu de télé-réalité où il s’agirait de vivre comme dans un couvent.

Qui sont les plus soumises ? Les femmes-objets que l’on habille ou les poupées qu’on déshabille ? La burqa ne peut-elle pas être "de chair" comme le dénonçait la regrettée Nelly Arcan. Eli Flory décentre les points de vue pour tracer les contours d’une oppression partagée dont aucune culture n’a le monopole : l’emprise des hommes sur le corps des femmes. C’est peu dire que cet objectif d’affranchissement reste pour toutes et tous d’actualité. V. R.

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