La totalité des marchés sont en hausse selon Michele Cobb, directrice de l’Association des éditeurs audio (APA) aux Etats-Unis, qui a donné une large synthèse des tendances constatées. L’élément déclencheur est l’équipement généralisé en smartphone, qui fait que tout le monde dispose du matériel de lecture, et la diffusion de fichiers en téléchargement, dominée par Audible, filiale d’Amazon, qui a beaucoup investi sur ce nouveau support. Kobo s’y est lancé il y a quelques mois. Les enceintes intelligentes d’Amazon, Apple, Google sont aussi un outil de diffusion idéal à la maison, où l’écoute du livre est devenue très importante, contrairement à l’intuition selon laquelle l’usage en mobilité dominait.
Un nouveau public
Cette croissance qui rappelle les débuts du numérique n’en aurait pas les inconvénients : le livre audio ne cannibalise pas le marché du livre papier, mais attire en général un nouveau public, plus masculin, urbain, et qui ne lisait pas ou peu auparavant constate Michele Cobb. C’est vrai surtout des marchés où le téléchargement domine (Etats-Unis avec +18% de chiffree d’affaires, Royaume-Uni avec +16% de CA), par rapport à ceux qui restent encore dominés par l’achat de CD, l’Allemagne étant le plus caractéristique (+1,1 de CA, ventes de CD à 77%, public plus féminin).
Les distributeurs spécialisés sont tous en expansion : Storytel, qui s’était lancé en 2005 en Suède et avait frôlé la faillite est maintenant implanté dans 15 pays, et prépare son arrivée en Inde. Bookwire, distributeur de livres numériques en Allemagne, a ajouté l’audio qui porte sa croissance, et a ouvert des filiales au Royaume-Uni, en Espagne, et au Brésil. À Dubaï, Tarek El Bolbol vient d’ouvrir Booklava, conscient que tout est à construire dans ce nouveau format dans le monde arabe, mais certain que ce sera plus porteur que l’industrie du tabac d’où il vient. En Russie, Tatiana Plyuta, directrice d’AudioKniga, qui revendique la première place des distributeurs de livres audio avec 2 000 références, voit une croissance de plus de 30% l’an prochain, et de 40% en 2020.
L'abonnement inquiète
Tout n’est cependant pas sans nuage : dans ce marché proche de la musique, le piratage est aussi bien présent, tout particulièrement en Chine. La volonté des diffuseurs de privilégier les systèmes d’abonnement inquiète aussi les éditeurs et les auteurs, qui ne s’y retrouvent pas vraiment en termes de revenus, ainsi que le fait remarquer Laure Saget, directrice du développement Livre audio chez Madrigall.
D’autre part, la production reste coûteuse : « il faut trois heures de travail en studio, avec un staff important, pour produire une heure d’enregistrement » rappelle Armanda d’Acierno. « Et malgré sa forte croissance, l’économie de ce marché restera différente de celle du cinéma, en raison des usages : on peut regarder plusieurs dizaines de films par an, alors que le volume d’écoute de livres audio est bien plus réduit » ajoute la responsable de PRH.