16 AOÛT - PREMIER ROMAN France

Pierrot, 30 ans, est maraîcher sur les marchés autour de Lille. Une vie difficile et précaire, sans amour déclaré mais riche d'amitié. Le voilà responsable de Marcus, "huit ans et des poussières", le fils d'Hélène dont il était l'amoureux non élu, toxico, qui vient de se jeter d'un pont. Fabienne, l'amie d'Hélène, nourrice occasionnelle, a insisté pour qu'il s'occupe de l'enfant, avant de sombrer elle-même dans le coma, à l'hôpital, en tentant de se sevrer.

L'homme et le garçonnet prennent leurs marques. Pour Marcus, Pierrot devient "Parrain". L'enfant apprend les rituels des marchés, puis est inscrit à l'école. Pierrot n'est pas seul : Francis et Margot, "les vieux", le cousin Bob et sa femme Nicole, "avec leurs deux moutards", "la grande Christine" qui travaille au bureau de poste, le pote Dédé... Tous entourent le père improvisé, tentant d'adoucir la dureté du quotidien dans un bain d'humanité solidaire. Même s'il ne peut pas compter sur le soutien d'Armand, son père, "jamais bête mais toujours con", avec qui les liens sont aussi distendus que brutaux, et qui ne veut pas entendre parler de l'enfant. Les deux maltraités du coeur s'attachent l'un à l'autre. "Mon petit dictionnaire de la vie s'appelait Marcus." Mais l'apprivoisement progressif, le bonheur amical..., cette belle image d'Epinal d'une adoption réussie, ne résiste pas très longtemps à la pression d'une violence qui rattrape ses proies.

D'ailleurs on sait dès le début que les choses ont mal tourné, même si l'enchaînement exact des circonstances qui ont conduit Pierrot dans une cellule partagée de la maison d'arrêt de Looz-lez-Lille, où se déroule toute la deuxième moitié du roman, n'est dévoilé que progressivement.

Pierre Chazal, lui aussi garçon du Nord, a trouvé une voix très juste à son narrateur, une simplicité gouailleuse qui sonne naturel. Ce parler de la déveine, qui articule bon sens, fatalisme et poésie pour former une langue, celle d'un monde où l'intimité et l'affection, toujours difficiles à exprimer, passent dans les surnoms qui rebaptisent et les prénoms, devancés d'un fraternel pronom possessif. Où les vraies familles sont d'élection.

07.10 2014

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