9 mars > Histoire France

Lointain épigone de Plutarque, Bertrand Le Gendre, spécialiste du général de Gaulle, s’est intéressé à la relation de celui-ci avec François Mauriac. C’est après la guerre de 39-45 que Mauriac a rencontré le Général, dont ses deux fils, Claude et Jean, étaient proches. L’écrivain résistant, l’auteur clandestin du Cahier noir paru chez Minuit sous le nom de Forez, rejoignait enfin "l’homme du 18 juin". Ils avaient nombre de points en commun : la génération, les origines sociales (provinciales et bourgeoises), la religion catholique, la formation intellectuelle (Péguy, Barrès, Maurras - vite rejeté -, Bergson…), un amour viscéral pour la terre, pour la France et pour la littérature.

L’un deviendra un écrivain fameux, académicien dès 1933, prix Nobel en 1952, l’autre, grâce à ses Mémoires, "de guerre" puis "d’espoir", connaîtra le succès et finira, posthume, dans la "Pléiade". Ils ont même poussé l’élégance jusqu’à mourir à quelques semaines d’écart en 1970, l’un le 1er septembre, laissant inachevé le manuscrit d’un roman, Maltaverne, l’autre le 9 novembre, ne terminant pas le premier tome de ses Mémoires d’espoir.

Si tout les rapprochait, beaucoup les éloignait, et leurs rapports furent tumultueux. Mauriac a toujours été mal à l’aise en présence de de Gaulle, et a souffert de ne pas occuper auprès de lui la première place, dévolue à Malraux. Secundus inter pares, il s’est opposé au Général dès l’épuration, tentant de sauver la tête du collabo Brasillach, puis en choisissant le MRP plutôt que le RPF. Avant de faire, à partir de 1958, totale allégeance. Des "oscillations", voire des palinodies, qui lui ont valu pas mal de lazzis, et même un pamphlet cruel de Jacques Laurent, Mauriac sous de Gaulle (La Table ronde, 1964), en réponse à son propre De Gaulle, pitoyable hagiographie parue chez Grasset la même année. Mauriac était bien meilleur dans son "Bloc-notes" de L’Express, fulminant, jusqu’à ce qu’il doive quitter son journal, devenu trop antigaulliste. De Gaulle, lui, appréciait son soutien, mais préférait ses romans. J.-C. P.

Les dernières
actualités