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L’écrivaine irlandaise Edna O’Brien est décédée

Edna O'Brien, lors de la remise de son prix spécial Femina en 2019. - Photo Olivier Dion

L’écrivaine irlandaise Edna O’Brien est décédée

Autrice d’une œuvre contestatrice et féministe qui a révolutionné la littérature irlandaise, l’écrivaine Edna O’Brien s’est éteinte samedi 27 juillet à l’âge de 93 ans.

Par Élodie Carreira
avec AFP Créé le 29.07.2024 à 11h59

L’écrivaine irlandaise Edna O’Brien s’est éteinte samedi 27 juillet à l’âge de 93 ans, des suites d’une « longue maladie » a annoncé son éditeur Faber sur son compte X. « Edna O'Brien était l'un des plus grands écrivains de notre époque, poursuit-il, Elle a révolutionné la littérature irlandaise, saisissant la vie des femmes et les complexités de la condition humaine dans une prose qui était lumineuse et simple, et qui a eu une influence profonde sur tant d'écrivains qui l'ont suivie ».

Et pour cause, deux fois finaliste, en France, des prix Médicis et Femina étrangers pour son autobiographie Fille de la campagne (2013) et son roman Les petites chaises rouges (2016), la dame de lettres irlandaise avait reçu en 2018 le « Nabokov Award for Achievement in International Literature », l'un des plus prestigieux prix américain PEN, pour « avoir abattu les barrières sociales et sexuelles élevées contre les femmes en Irlande et bien au-delà ». À ces distinctions, le jury français du prix Femina a également ajouté, en 2019, un prix spécial pour récompenser l’ensemble de son œuvre.

« L’un des écrivains de l’Irlande moderne les plus célébrés et honorés »

Dans un communiqué, le président irlandais Michael D. Higgins a décrit l’autrice comme « l'un des écrivains les plus exceptionnels des temps modernes ». Un hommage doublé par celui-ci du Premier ministre irlandais, Simon Harris, qui a déploré la perte d’« une icône » et a détaillé : « La plupart des gens auraient arrêté face à la misogynie qu'elle a subie, mais Edna O'Brien a continué à travailler son art et est devenue l'un des écrivains de l'Irlande moderne les plus célébrés et honorés ».

Née en 1930 dans le comté de Clare, Edna O’Brien, de son nom complet Josephine Edna O’Brien, évolue dans un milieu rural et conservateur dont elle déplore le repli. Malgré l’alcoolisme et la violence de son père, elle obtient, en 1950, un diplôme de pharmacie. Deux ans plus tard, elle épouse, contre l’avis de ses parents, l’écrivain Ernest Gléber avec lequel elle s’installe à Londres et donne naissance à deux enfants, avant leur séparation en 1964.

Une œuvre livrée à la censure irlandaise

Fervente lectrice des œuvres de Tolstoï, Francis Scott Fitzgerald ou encore James Joyce (à propos duquel elle écrira quelques biographies), Edna O’Brien s’inspire du caractère subversif de ces auteurs pour nourrir sa propre écriture. En 1960, elle publie son premier titre et premier volet d’une trilogie, Les filles de la campagne, dans lequel elle dépeint l’initiation sexuelle de deux jeunes femmes. Mais le thème et le ton provocateurs de l’ouvrage sème le trouble en Irlande. Interdit de vente en librairies, le livre est parfois même brûlé pour « manque de religion et de pornographie ». Les deux autres volumes de la série, publiée en intégralité chez Fayard en 1988, The Lonely Girl  (1962) et Girls in Their Married Bliss (1964) subissent le même sort.

Mise au ban dans son pays d’origine, l’écrivaine aux cheveux couleur de feu trouve néanmoins un succès fiévreux à l’étranger. Dès 1962, elle est saluée par la presse et reçoit le prestigieux prix américain Kingsley Amis Award. Six ans plus tard, La France aussi s’empare de ses œuvres, à commencer par Le Joli Mois d’Août  publié par Gallimard. Fayard prendra ensuite la relève, jusqu’à son dernier titre, Girl (2019), édité par Sabine Wespieser éditeur.

Rebelle et féministe

Autrice d’une vingtaine de romans, Edna O’Brien a durablement transformé la littérature irlandaise en y insufflant une parole féminine inédite. Dans des titres à l’instar de A Pagan Place (1970), l’autrice dépeint son enfance, villageoise et répressive. De fil en aiguille, son regard se déporte sur l’intimité de femmes sacrifiées par une éducation qu'elle décrit dans une langue sans concession comme punitive et moyenâgeuse, à l’image d’une Irlande tyrannisée par des mœurs religieuses particulièrement sévères.

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