De retard en retard, on n’osait plus l’espérer. Dimanche 1 er octobre, Sony a enfin lancé sa librairie digitale en ligne (ebooks.connect.com), plate-forme commerciale et de téléchargement pour son fameux e-book en encre et papier électronique, le Reader. Doit-on en conclure que le Reader est donc, lui aussi, mis en vente ? At last ? Oui ! L’appareil, dont le nom commercial officiel est désormais le Sony PRS 500, est prévu pour débarquer dans les 200 librairies de la chaîne Borders dans le courant du mois. Mais on peut d’ores et déjà le commander en ligne (à condition d’être résident américain) sur le site Sony (sony.com/reader). Sauf que. Sauf que, « face à une très importante demande, les commandes ne pourront être servies qu’à la mi-novembre », prévient-on déjà le client. Info, ou intox ? Après tout, l’accumulation des retards ayant aiguisé l’impatience des technophiles, il ne serait pas étonnant que l’ouverture du guichet de vente ait provoqué un raz-de-marée. Comme l’a très joliment résumé Peter Svensson, un journaliste de l’Associated Press, dont l’article a été publié dans plusieurs journaux régionaux américains dimanche, le livre « qui était jusqu’ici l’orphelin du monde digital » est sans doute à l’aube d’entrer dans une nouvelle ère : « Si le Reader de Sony ne constitue pas un iPod pour livres, c’en est en tout cas la première étape », ajoutait-il. Voilà pour les bonnes surprises. Et maintenant, les mauvaises. Elles sont de taille. D’abord, le prix du Sony PRS 500 : 350 dollars (très exactement 349,99) : cher, très cher, et même très, très cher pour la bourse de l’Américain moyen. A ce prix-là, pas sûr que l’afflux de commandes risque d’engorger longtemps les services de livraison de Sony… Mais là où les bras m’en sont tombés, c’est en découvrant le prix des ouvrages proposés en téléchargement. La boutique, qui vient donc tout juste d’ouvrir, ne permet encore qu’un choix limité. Pour s’en tenir à la seule littérature, l’offre se cantonne surtout pour l’instant aux best-sellers. Le Da Vinci Code , Anges et démons , le dernier roman d’Anne Rice, Le diable s’habille en Prada , etc. Ou quelques grands classiques. Comme Gatsby le Magnifique , vendu… 7,99 dollars. Trop cher à mon avis. Anges et Démons est lui à 5,59 dollars. Trop cher encore, pour un livre dont la carrière en librairie est pour l’essentiel derrière lui. Mais le « mur du çon » (comme on dit au Canard ) est pulvérisé avec Predator , de Patricia Cornwell, vendu… 21,56 dollars en téléchargement ! L’ouvrage (une enquête de Kay Skarpetta) est « vieux » d’un an. Son prix de vente grand format (hard cover) est de 26 dollars et des brouettes en librairie. Mais Amazon le propose désormais avec 35% de remise, à 17,79 dollars, quand la version poche (paperback) est, elle, déjà disponible à 9,59 dollars. Vendre le téléchargement de Predator plus de 21 dollars, c’est au mieux une hérésie, au pire une escroquerie. A tout le moins un contresens absolu. Sony, probablement, n’y est pour rien. On a beaucoup dit que les retards de lancement du Reader étaient en partie imputables aux difficiles négociations avec les éditeurs pour constituer un catalogue. Ces derniers ne font que marquer contre leur camp quand ils s’obstinent à freiner la complémentarité des supports, plutôt que l’encourager. * * * Sinon, toujours au chapitre de l’e-book version encre électronique, Amazon, qu’on savait depuis un moment s’intéresser au sujet (ce qui expliquerait notamment qu’Amazon ait refusé de vendre le PRS 500 sur son site), a dévoilé il y a quelques jours son premier prototype, l’Amazon Kindle. Un e-book à clavier, dont le moins qu’on puisse dire est qu’il n’est pas très glamour. Côté design, Sony les bat à plate couture (d’ailleurs, pour ceux que ça intéresse, le site américain engadget.com a publié la semaine dernière toute une série de clichés du Reader).