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Les dessous du rapprochement entre Delcourt et Editis

Guy Delcourt, fondateur des éditions Delcourt - Photo Olivier Dion

Les dessous du rapprochement entre Delcourt et Editis

L’intégration prochaine du groupe Delcourt dans Editis doit permettre au numéro deux français de l’édition de se développer sur un marché de la bande dessinée où il est encore peu présent. La question de la distribution, alors que Delcourt est distribué par Hachette, sera l’un des grands chantiers du rapprochement entre les deux entités.

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Par Charles Knappek
Créé le 23.07.2024 à 23h02

Si tout se passe bien, le groupe Delcourt fera partie intégrante d’Editis d’ici la fin de l’année ou au plus tard au premier trimestre 2025. Les deux entités, entrées en négociations exclusives, doivent encore soumettre leur projet à l’information-consultation des instances représentatives du personnel de Delcourt et obtenir le feu vert des autorités de la concurrence à Bruxelles. A priori une simple formalité, qui devrait permettre à Editis de boucler sa première acquisition d’envergure depuis son rachat fin 2023 par le milliardaire tchèque Daniel Kretinsky.

À l’initiative de l’opération on retrouve Guy Delcourt. Le fondateur du groupe qui porte son nom, aujourd’hui âgé de 66 ans, avait à cœur de préparer sa succession. Car si l’éditeur a trois enfants, aucun d’entre eux n’est appelé à prendre sa suite. « N’ayant pas de succession familiale, il m’est apparu de ma responsabilité d’assurer la pérennité de la maison durant ma présence à sa tête et au-delà, confie-t-il à Livres Hebdo. Il est inéluctable que la maison changera un jour de mains au niveau de son actionnariat. J’ai préféré prendre les devants et choisir le moment adéquat pour trouver un acquéreur qui satisfera nos exigences et se montrera rassurant sur l’avenir du groupe. »

Editis, le candidat idéal

Le groupe Delcourt, qui a réalisé un chiffre d’affaires de 104,2 millions d’euros en 2023, en léger recul par rapport à 2022 (108,4 millions d’euros), a aussi été confronté au désir de son actionnaire minoritaire Florac (qui détient 49 % des parts, contre 51 % pour la holding familiale de Guy Delcourt) de se retirer : société de participations fondée et présidée par Marie-Jeanne Meyer, actionnaire historique du groupe Louis-Dreyfus, Florac était entré au capital du groupe Delcourt en 2018. Son départ annoncé, « légitime après six années », selon Guy Delcourt, a donc quelque peu accéléré le tempo. En début d’année, l’éditeur a mandaté la banque Rothschild pour l’accompagner dans la quête d’un repreneur.

Très vite, Editis est apparu comme le candidat idéal. Le numéro deux français de l’édition, peu implanté dans le secteur de la bande dessinée – il publie surtout du manga avec Kurokawa, un peu de BD avec Nathan, L’Agrume et Philéas, des comics avec 404 Graphic et Black River et s’est récemment lancé dans le webtoon avec Kotoon –, veut se développer sur un marché qui compte parmi les plus dynamiques du livre.

Grande autonomie

Les deux entités se pratiquent déjà : Delcourt a travaillé en coédition avec plusieurs maisons d’Editis dont La Découverte ou First, monté des projets communs autour de youtubeurs ou encore adapté en bande dessinée des romans de Jean Teulé, parus chez Julliard.

Le facteur humain a aussi joué : la directrice générale du groupe Delcourt Anne-France Hubau-Nicolas et le secrétaire général Pierre-Adrien Adeline sont tous deux des anciens d’Editis. Ils ont travaillé avec l’actuelle DG Catherine Lucet et la DG adjointe Marie-Christine Conchon et les apprécient.

Surtout, le groupe Delcourt s’est vu garantir une grande autonomie au sein d’Editis. Si Guy Delcourt cède ses parts, il doit conserver la présidence pendant une durée indéterminée. « Ne plus être actionnaire ne remet pas en cause mon engagement dans la maison que j’ai fondée », glisse l’intéressé, qui se réjouit de s’inscrire « dans une perspective de long terme » et de conserver ses équipes, « sans suppression de postes ». Le groupe Delcourt restera aussi dans ses locaux du Xe arrondissement de Paris, pour lesquels un bail de longue durée est en cours.

« Toutes les maisons d’Editis sont indépendantes et autonomes sur le plan éditorial, rappelle pour sa part Catherine Lucet auprès de Livres Hebdo. Il est prévu que Guy Delcourt reste à la tête de la maison comme président et qu’il continue d'en superviser tous les aspects éditoriaux. »

L'enjeu de la distribution

À moyen terme, l’un des chantiers majeurs sera la distribution de Delcourt, actuellement sous contrat avec Hachette, et ce jusque fin 2025. L’éditeur, qui publie près de 700 nouveautés par an et dénombre quelque 13 000 titres à son catalogue devrait basculer chez Interforum dès 2026.

De son côté, Delsol, la filiale de diffusion de Delcourt, intègrera Interforum et continuera d’exercer son activité pour le compte de ses éditeurs partenaires.

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