3 janvier > Roman Etats-Unis > Jean Hegland

Dans la forêt, le roman de l’Américaine Jean Hegland paru en 1996 et traduit pour la première fois en français, emprunte à la fois au scénario d’anticipation post-apocalyptique de La route de Cormac McCarthy et à l’atmosphère de sauvagerie naturelle des premiers romans de David Vann. Il imagine dans un futur proche, alors que notre organisation sociale vacille après une série de catastrophes qui restent floues et à l’état de rumeurs, la lutte pour survivre de deux sœurs adolescentes dans la maison familiale isolée au cœur d’une forêt au nord de la Californie. L’implacable retour à une vie primitive d’Eva, 18 ans, et de Nell, 17 ans, la narratrice, qui consigne leur histoire quand tout, électricité, essence, vivres, commence à manquer.

Depuis la mort de leur mère puis, deux ans plus tard, celle de leur père, les deux adolescentes vivent seules à 50 kilomètres du premier bourg. De leurs parents un peu excentriques - le père, directeur d’une école publique, la mère, danseuse au Ballet de San Francisco reconvertie dans la tapisserie -, elles ont reçu enfants une éducation libre, encourageant l’autonomie et la liberté de choix. La première s’est vouée à la danse classique et, désormais privée de musique, continue de répéter inlassablement au seul son d’un métronome. La cadette, qui rêvait d’entrer à Harvard, lit l’encyclopédie de A à Z, l’ordinateur étant devenu un objet sans utilité. Un poêle à bois, un potager, l’eau d’une source, trois poules, plus tard les ressources de la forêt…, les rescapées apprennent les gestes vitaux, les réflexes d’économie pour faire face à tous les dangers qui les menacent.

Dans la forêt est une histoire palpitante et édifiante de survie mais aussi de sororité, ce lien à la vie à la mort fortifié par la nécessité d’être solidaires dans l’adversité. Un huis clos haletant qui fait froid dans le dos en mettant en scène notre dépendance et la vulnérabilité de notre mode de vie, mais qui dégage aussi la puissance d’un archaïque instinct de conservation et d’une réconfortante capacité d’adaptation. Ce best-seller aux Etats-Unis a inspiré un film, Into the forest, sorti en 2015 avec Ellen Page et Evan Rachel Wood dans le rôle de ces deux pionnières contemporaines. V. R.

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