Le nom de Nicolas Desmaretz (1648-1721) ne dit plus rien. Ce ministre a disparu avec ses dossiers dans l'ombre de Louis XIV. Il avait déjà connu la disgrâce en 1683 pour une sombre histoire de pots-de-vin dite « affaire des pièces de quatre sols » avant de retrouver vingt-cinq ans plus tard sa place de grand argentier. De 1708 à 1715, dans les années crépusculaires du Roi Soleil, avec cet hiver glacial de 1709 qui lui valut son surnom de « ministre des grains », il fut contrôleur général des Finances. A travers la vie quotidienne de ce « Colbert oublié » - dont il était le neveu -, Stéphane Guerre raconte le fonctionnement de l'institution en nous montrant cet Etat en faillite de l'intérieur. Il rend ce travail incarné, même si nous restons dans le cadre de ce qui fut à l'origine une thèse. Pour Stéphane Guerre, Desmaretz ne fut pas qu'un exécutant zélé, mais un rouage politique de la machine de l'Etat qui influença le roi en lui montrant la réalité de la situation économique et la nécessité d'y répondre par des réformes monétaires. C'est lui qui créa l'impôt du dixième qui frappait tous les revenus, et donc très critiqué par la noblesse et le clergé. Arracher un personnage à l'oubli est l'une des tâches les plus difficiles pour un historien. C'est ici réussi. Laurent Lemire