Droits des auteurs

Négociations interprofessionnelles : le SNE douche les espoirs des auteurs

Pierre Sirinelli

Négociations interprofessionnelles : le SNE douche les espoirs des auteurs

La mission Sirinelli, lancée en mai 2021 par Roselyne Bachelot pour accompagner les négociations professionnelles entre auteurs et éditeurs, s’achève sur un constat d’échec. Le SNE a refusé de signer l’accord négocié avec les organisations d’auteurs.

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Par Charles Knappek
Créé le 18.03.2022 à 12h11

Dix mois de négociations pour rien ? Censées aboutir à un accord le 16 mars, les discussions professionnelles sur l’équilibre de la relation contractuelle entre auteurs et éditeurs dans le secteur du livre, animées par le professeur de droit privé Pierre Sirinelli, nommé médiateur des négociations sur le contrat d'édition en mai dernier, ont connu un épilogue-surprise.

Alors que les organisations des auteurs de l’écrit (représentées par l’ATLF, la Scam, la SGDL et le SNAC pour le Conseil permanent des écrivains, la Ligue des auteurs professionnels ainsi que la Charte des auteurs et illustrateurs jeunesse jusqu’à son départ début février) avaient toutes validé dans leurs conseils d’administration respectifs un projet d’accord difficilement négocié, le Syndicat national de l’édition (SNE) s’est, de son côté, désisté au dernier moment.

Dans une communication réservée à ses adhérents, le SNE, qui ne prévoit pas d’autre communication à ce stade, indique simplement avoir constaté que « les conditions ne sont pas réunies pour procéder au vote sur le projet d’accord ». En réalité, l’instance n’a pas été en mesure d’atteindre le quorum nécessaire à la validation du vote… sans qu’il soit possible de dire si ce couac résulte d’un problème de gouvernance dans le contexte sensible du rapprochement Editis/Hachette, ou plus simplement du refus concerté des éditeurs de signer un texte qui ne leur convient pas.

Avancées significatives

Le projet d’accord, s’il n’avait abouti à aucun consensus s’agissant de la rémunération des auteurs – point central de la discussion –, prévoyait tout de même plusieurs avancées significatives : les parties s’étaient notamment entendues sur le passage progressif d’une reddition des comptes annuelle à une reddition des comptes semestrielle obligatoire, assortie du paiement des droits dus aux auteurs. De la même manière, le texte prévoyait une information systématique de l’auteur en cas de cession de ses œuvres à des tiers ; l’envoi à l’auteur d’une attestation de fin de contrat ; la mise en place d’une information spécifique relative aux contributions non significatives ou encore la généralisation de l’information du traducteur en cas de disparition du contrat de cession de l’œuvre traduite.

Mais en l’absence de signature du SNE, aucune de ces mesures ne pourra être appliquée. Certes, le SNE ne ferme pas complètement la porte. « Devant l’importance des enjeux pour l’ensemble des maisons d’édition, le bureau du SNE a pris la décision, à titre exceptionnel, de lancer une consultation des membres du syndicat à l’occasion d’une prochaine assemblée générale pour recueillir les avis de chacun », indique l’instance auprès de ses adhérents.

De leur côté, les organisations d’auteurs, font part de leur « exaspération ». Dans un communiqué, elles dénoncent « la désinvolture avec laquelle le SNE traite ses partenaires – auteurs et ministère de la Culture. » « Le projet d’accord prévoyait une clause de poursuite des négociations, regrette auprès de Livres Hebdo Stéphanie Le Cam, directrice générale de la Ligue des auteurs professionnels, qui a pris part aux discussions. En l’absence d’engagement du SNE, nous ne savons même pas si des négociations pourront reprendre après la période électorale. »

Dans l’ignorance de ce que pourrait donner un hypothétique nouveau volet de négociations, les organisations d’auteurs espèrent maintenant une décision politique. « La solution ne peut pas venir des auteurs seuls, trop faibles pour faire valoir leurs vues face aux éditeurs, conclut Stéphanie Le Cam. Pour cette raison, le législateur a un rôle à jouer. Nous bénéficions déjà de l’écoute attentive de nombreux parlementaires issus de tous les bords politiques, qui sont effarés d’apprendre les conditions dans lesquelles les auteurs exercent leur métier. Il y a tout un travail de lobbying à mener, nous allons continuer à défendre les intérêts des auteurs. »

 

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