5 avril > Roman Italie > Silvia Avallone

L’une, Adele, 17 ans, tombe enceinte sans l’avoir désiré. L’autre, Dora, 30 ans, tente vainement d’avoir un enfant. La première vit, avec sa mère et sa sœur cadette, dans une cité populaire en banlieue de Bologne où elles ont emménagé quand le père a disparu de leur vie des années plus tôt. La seconde est professeure de littérature italienne dans un lycée du centre historique bolonais et a épousé Fabio, le plus beau garçon de leur petite ville de jeunesse, devenu architecte. Deux jeunes femmes face une maternité problématique. Deux mondes à seulement quelques kilomètres de distance, à 50 minutes de bus, et pourtant étrangers l’un à l’autre. Seul Zeno, le voisin d’Adele, le doué, le littéraire, qui va au "lycée classique" et passe pour un traître aux yeux de ceux du quartier, semble pouvoir établir une passerelle entre ces deux planètes.

Silvia Avallone, révélation des lettres italiennes à seulement 27 ans avec D’acier (Liana Levi, 2011), premier roman et best-seller international, adapté en 2013 au cinéma, poursuit, toujours chez Liana Levi, sa chronique dénonciatrice de l’Italie contemporaine. Elle dépeint avec réalisme et empathie les désarrois de sa génération grandie sous Berlusconi et plus largement les impasses d’une société en crise. L’intime - la violence physique de l’enfantement, le parcours de combattant des couples affrontant la stérilité, le complexe de classe, la désertion des hommes en général et des pères en particulier - est toujours connecté à la brutale réalité politique du déterminisme social, de la ségrégation spatiale, de la relégation, dans ces périphéries où se glissent en dépit de tout, par effraction, des moments de Vie parfaite. Après Piombino, la petite ville industrielle de la côte toscane, théâtre de D’acier, où la romancière a passé une partie de son adolescence, une vallée des Alpes piémontaises dans Marina Bellezza (Liana Levi, 2014), c’est à Bologne, où elle a fait ses études et vit désormais, et dans la cité imaginaire des Lombriconi (des gros lombrics), qui "représente [sa] géographie personnelle de l’exclusion", que Silvia Avallone, dont Daniel Pennac a salué l’"énergie romanesque incarnée", fait courir à un rythme enlevé cette histoire d’espérance et de fatalité. Véronique Rossignol

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