Même si le confinement a porté un coup d'arrêt brutal à la croissance du marché des classiques pédagogiques, les éditeurs gardent le sourire. Selon GFK, entre avril 2019 et mars 2020, les ventes ont bondi de 16,6% en valeur et de 18,2 % en exemplaires. Une performance que le segment doit indubitablement à la réforme du bac français. « En imposant des œuvres, le changement des programmes a certes fermé la liberté pédagogique, mais a eu le mérite d'encadrer les lectures », estime Cécile Labro, directrice du parascolaire chez Hachette Education. A tel point qu'Isabelle Dubois, directrice éditoriale des classiques et de la non-fiction au Livre de poche (LGF) a vu « beaucoup de classiques hors édition parascolaire progresser nettement, ce qui n'était pas arrivé depuis longtemps ».
Bénéfique pour l'ensemble des éditeurs, la réforme a tout de même rebattu certaines cartes. Même si Flammarion conserve sa place de leader sur le segment grâce à ces trois collections (GF, Librio et Etonnants classiques), la maison s'est fait détrôner de la première marche sur le champ strict des classiques, et notamment ceux prescrits pour le bac, par Hatier. La filiale d'Hachette récupère là le bénéfice du « gros travail de prescription entrepris depuis de longues années », se félicite Rachel Duc, directrice du parascolaire d'Hatier. Toutefois, les positions devraient s'inverser dès cette année, Flammarion étant la seule maison à disposer des droits de Juste avant la fin du monde, de Jean-Luc Lagarce, qui entre au programme à la rentrée.
Envoi précoce des spécimens
Autre éditeur en forme, Belin affiche un éclatant 17 % de croissance grâce à une mise en place massive dans les librairies conjuguée à un envoi précoce des spécimens. « Nos ouvrages figuraient parmi les rares propositions que les enseignants ont eues entre les mains en même temps que les manuels », assure Turiane Guitton, responsable marketing de la filiale d'Humensis. L'édition de quasiment toutes les œuvres prescrites pour le baccalauréat a aussi participé au succès. Pour conserver son avance, et dynamiser les ventes non liées au bac, Belin lance fin août deux nouvelles collections. « Déclic : vous allez aimer lire », s'adresse aux collégiens qui, justement, n'aiment pas lire. La mise en page aérée et attrayante et l'introduction de ressources numériques (son et vidéo) adaptées à l'utilisation en classe comme à la maison doivent solliciter tous les sens des élèves et leur faciliter l'accès au texte. Huit titres sont programmés parmi lesquels La belle et la bête, Les fourberies de Scapin et L'évasion d'Arsène Lupin. A la même date et obéissant au même objectif d'accessibilité, « Not so classic », proposera aux lycéens quatre œuvres en version originale.
Trois autres nouvelles gammes voient le jour cette année sur le segment des classiques avec pour ambition de faciliter la lecture des textes. Dans la lignée de « Boussole », conçue par Belin en 2016 pour introduire les grands classiques au primaire, notamment au cycle 3, Larousse a imaginé « Mes premiers classiques Larousse ». Quatre titres ont été commercialisés en janvier dont Peter pan et Tom Sawyer. S'adressant aux plus grands, Flammarion repense l'édition des grandes œuvres de philosophie grâce à « GF philo' ». Destinée aux étudiants comme au public novice, la gamme se veut « moins trapue dans son approche afin que les textes puissent être lus sans aucun prérequis, explique Pauline Kipfer, directrice éditoriale poche de Flammarion. L'ajout de références, d'auteurs et d'extraits en lien avec les thèmes abordés permet aussi de nourrir la culture philosophique du lecteur. »
Toujours pour les lycéens, Nathan creuse le sillon tracé par les « Profil » d'Hatier avec « Une œuvre, un parcours ». Ne proposant pas le texte intégral mais des clés pour le comprendre, des citations et des sujets de dissertation ainsi qu'un entrainement à l'oral, la collection a été inaugurée par quatre titres en janvier. Elle s'enrichira à la rentrée des trois nouvelles œuvres prescrites pour les filières générales du bac.