Avant-Critique Essai

Olivier Zunz, "Tocqueville. L'homme qui comprit la démocratie" (Fayard) : De l'esprit de la démocratie

Alexis de Tocqueville - Photo DR

Olivier Zunz, "Tocqueville. L'homme qui comprit la démocratie" (Fayard) : De l'esprit de la démocratie

Une nouvelle biographie de Tocqueville, signée Olivier Zunz, montre la face morale et spirituelle du grand penseur de la liberté en politique.

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Par Sean Rose
Créé le 25.04.2022 à 16h00 ,
Mis à jour le 25.04.2022 à 20h01

Tocqueville, quoique d'ancienne noblesse et né au sein d'une famille légitimiste, n'a jamais goûté la restauration de l'Ancien Régime et aspire à la démocratie. Cherchant un prétexte pour prendre ses distances vis-à-vis de la monarchie de Juillet qu'instaure l'accession au trône de Louis-Philippe, le jeune magistrat s'embarque pour l'Amérique aux côtés de son ami Gustave de Beaumont, afin d'enquêter sur le système pénitentiaire américain. L'occasion surtout pour lui d'observer une république de plus près... Ce voyage jettera les bases d'une réflexion plus large sur la liberté, laquelle réflexion prendra la forme de son grand œuvre De la démocratie en Amérique (1835-1840).

Dans cette nouvelle biographie d'Alexis de Tocqueville, Olivier Zunz retrace le parcours intellectuel et politique de celui qui fut d'une lucidité formidable sur le fonctionnement du « pire des régimes à l'exception de tous les autres » selon le mot de Churchill. Tout en louant l'unique système qui garantisse la liberté des citoyens, l'anatomiste du modèle démocratique outre-Atlantique n'ignore point ses écueils : « la tyrannie de la majorité » ou l'électoralisme, la tentation de tout président une fois élu d'œuvrer démagogiquement pour sa propre réélection. En France, Tocqueville, fidèle aux idéaux de 1789, n'en perd pas moins sa clairvoyance. Dans L'Ancien Régime et la Révolution (1856), il analyse avec acuité la tension inhérente au caractère national qui peine à concilier la folle aspiration à la liberté avec le non moins farouche désir d'égalité, notant par ailleurs que « les Français ont trouvé leur position d'autant plus insupportable qu'elle devenait meilleure. » Écœuré par l'esprit bourgeois qui cherche des places et cautionne sans barguigner le coup d'État de Louis-Napoléon Bonaparte alias Napoléon III, Tocqueville, député, et même ministre sous la IIe République, demeure aristocratique dans sa vision de la liberté- non tant une licence de faire ce qu'on veut qu'un effort à servir librement le bien. Catholique libéral (c'est-à-dire, ouvert aux Lumières), Tocqueville est républicain par raison et foi- il est intimement convaincu que, décidée par la divine providence, la démocratie est la seule voie de l'avenir. Plaise à Dieu qu'elle le soit.

Olivier Zunz
Tocqueville. L'homme qui comprit la démocratie Traduit de l’anglais (États-Unis) par Alexia Blin
Fayard
Tirage: 2 000 ex.
Prix: 24 € ; 480 p.
ISBN: 9782213700557

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