Au début, il y a un pari. Stupide, sans doute. Deux amis, deux écrivains, encouragés par leurs libations préprandiales à base de gibelotte de lapin et de puligny-montrachet, se mettent au défi de réunir lors des rencontres en librairies, salons du livre ou bibliothèques, qui leur sont comme autant de Waterloos littéraires, le moins de monde possible. La lutte sera acharnée et mènera les deux belligérants à renoncer à l'écriture pour la carrière, guère plus lucrative mais moins traumatisante, de libraire. Entre-temps, on se sera promené, de désastres en catastrophes, dans le bibliobus municipal de Soussey-sur-Brionne, à la bibliothèque Théodore-Botrel de Canapé-en-Plonéour-Lanvern, à la Fête du livre et de l'endive de Monchaux-sur-Ecaillon ou à la médiathèque Saint-Hubert de Gandrange.
Ce conte moral hilarant et pince-sans-rire, qui parvient à n'être jamais amer et toujours allègre, est l'oeuvre croisée de Christian Garcin et Pierre Autin-Grenier (ou de Christophe Garçon et Paul Autant-Grognard, leurs noms de plume pour l'occasion) ; chacun composant un court texte en miroir de celui de son compère. Ces deux textes étaient initialement parus dans Dazibao, la revue du CRL en Paca. Ils sont désormais édités en un mince volume chez Finitude, que ce genre d'olni (objet littéraire non identifié) ne rebute pas. On prendra à sa lecture le parti d'en rire (et à gorge déployée, encore) plutôt que celui de se désoler. Et l'on s'interrogera pour savoir si vraiment "Christophe Garçon" s'est bien prêté dernièrement à une lecture croisée avec Mazarine Pingeot à la maison de la poésie Léonid-Brejnev d'Aubervilliers... On aimerait le croire.