Difficile de ne pas y voir un plébiscite. Les journalistes littéraires qui ont accepté de répondre à ces questions trépidantes et gratuites sont unanimes cette année qui (pré)voient Kamel Daoud apparaître à la fenêtre du salon Goncourt de Chez Drouant le 4 novembre, sur le coup des 13h, pour son deuxième roman Houris, paru chez Gallimard.
Cousue de fil blanc, cette élection ? Chacun des non-jurés y va de son argument et c’est peut-être dans les réponses à la question de savoir qui le mérite (voir ci-dessous) qu’on trouve les meilleurs hommages. Gaël Faye, avec lui aussi son deuxième roman Jacaranda paru chez Grasset, est l’outsider préféré du panel tandis que Sandrine Collette pour Madelaine avant l’aube (JC Lattès) et Hélène Gaudy pour Archipels (L’Olivier) ne semblent pas générer de pronostics favorables.
Cette année, c’est le Goncourt qui lancera le premier prix de la semaine littéraire, suivi de près par le Renaudot, pour lequel Gaël Faye et Kamel Daoud sont également en lice. Ce dernier figure également dans la liste finale du prix Interallié, proclamé la semaine suivante, le 13 novembre.
Qui aura le Goncourt 2024 ?
Vincent Jaury – Transfuge
« Je l'ai écrit au mois d'août dans Transfuge : Kamel Daoud pour Houris. Pourquoi ? Un grand livre littéraire. Un courage politique : s'attaquer au patriarcat en Algérie. De nombreux jurés acquis à sa cause. Puissance de Gallimard. Des ventes déjà importantes. Un sujet, l'islamisme, au cœur des questions et des peurs contemporaines. Seul roman des quatre qui peut avoir une résonance internationale. What else ? »
Baptiste Liger – Lire Magazine
« Difficile de ne pas voir Kamel Daoud et Houris en pole position : intellectuel respecté, indéniable ambition littéraire du projet, symbole politique évident, gros succès en librairie… Mais une surprise n’est pas à exclure, en raison du style très "chargé" de l’auteur et du côté très démonstratif de son récit… »
« Ce sera un Goncourt politique »
Marianne Payot – L’Express
« Kamel Daoud pour Houris (Gallimard), à moins que cela soit Gaël Faye, l’auteur de Jacaranda (Grasset) : c’est ce qu’on aurait pu écrire il y a encore quelques jours. La rumeur voulait alors que les Dix de chez Drouant soient parfaitement partagés, cinq contre cinq. Soit un final excitant entre deux auteurs francophones (algérien, franco-rwandais, ayant chacun connu de près ou de loin les horreurs et les massacres de la guerre) publiés par deux grandes maisons d’édition littéraires et dont les romans connaissent un beau succès en librairie. L’année dernière, Jean-Baptiste Andrea (Veiller sur elle) avait été sacré au 14e tour grâce à la double voix du président Didier Decoin, tout comme Brigitte Giraud (Vivre vite) en 2022… Jamais deux sans trois ? (À savoir que cette année le nouveau président Philippe Claudel a décidé que la double voix sera attribuée de manière aléatoire). Mais voilà que deux membres du jury auraient récemment "viré de bord" et que Kamel Daoud serait donné gagnant à quelque 70%.... »
Ilana Moryoussef – France Inter
« Kamel Daoud. Pas tant pour ses qualités de romancier que pour son courage intellectuel. Ce sera un Goncourt politique.»
Hugues Honoré – AFP
« Gaël Faye ou Kamel Daoud, manifestement. Gaël Faye me semble tenir la corde, donc c’est sur lui que je parierais. Il a beaucoup d’atouts : le plus grand succès en librairie, un message plus positif, et cette multiplicité de talents qui permettrait aux Goncourt de consacrer un chanteur, comme quand Bob Dylan avait eu le Nobel. »
Sean Rose – Livres Hebdo
« Kamel Daoud et pour plein de raisons. C’est une belle écriture mais aussi parce que le sujet, bien que passé dans les faits, est malgré tout actuel avec le prisme des violences faites aux femmes et porté par une langue lyrique. Il a déjà eu le Goncourt du premier roman avec Meursault, contre-enquête paru chez Actes Sud. Cela couronnerait son entrée chez Gallimard. »
Qui mérite le Goncourt 2024 ?