Satisfaits de pouvoir à nouveau ouvrir en grand leurs portes, les libraires se disent "impatients" de retrouver leurs clients et de "refaire leur travail comme ils aiment le faire", insiste Martine Lebeau, gérante des Volcans à Clermont-Ferrand qui avait pris la décision d’arrêter le click and collect au cours du reconfinement.
Retour du conseil et ventes complémentaires
Le retour du conseil est notamment très attendu, qui offre la possibilité de "vendre à nouveau toutes ces belles pépites et ces livres merveilleux qui avaient disparu aux yeux du grand public, effacés par les best-sellers", souligne Emilie Montbarbon, directrice de la librairie familiale à Bourg-en-Bresse. "Il fallait que ça réouvre, les ventes complémentaires ne se faisaient plus", abonde Bertrand Watelet, propriétaire de la librairie Amory à Reims.
"Heureux" d’avoir vu leur combat aboutir et de pouvoir lever le rideau samedi 28 novembre, les libraires s’activent désormais pour remettre en ordre de marche leurs magasins qui s’apparentaient à des entrepôts. "Nous avons trois jours pour ranger livres et commandes et raviver tables et vitrines qui vont enfin se teinter des couleurs de Noël", s’enthousiasme Emilie Montbarbon. La jeune directrice, qui tient vraiment à accueillir ses clients dans une "ambiance festive" travaille également à rafraichir sa signalétique "sanitaire. C’est elle qui nous permet de rouvrir, nous y sommes particulièrement attentifs."
Chez Eureka Street, à Caen, Pierre Thomine réorganise l’agencement de son magasin, "bouleversé pour pouvoir montrer aux passants dans la rue le plus de livres possibles. Certains rayons sont aussi par terre, déposés là dans l’urgence pour accueillir les commandes du click and collect."
Augmenter la jauge
A l’autre bout de la France, Karine Depeyre, propriétaire du bistrot-librairie Le Kairn à Arras-en-Lavaudin, dans les Pyrénées, "étend ses ailes de libraire sur la partie restaurant" pour quasiment doubler sa surface de présentation, offrir de bonnes conditions d’accueil et augmenter sa jauge. "Les gens et les rayons vont pouvoir respirer", assure la libraire qui s’est en outre employée à repasser en urgence certains réassorts pour Noël.
Martine Lebeau cherche elle aussi de la place et s’apprête à "externaliser la fabrique de paquets-cadeaux." Elle planche également sur les plannings et a embauché six personnes dont des vigiles pour assurer le comptage des clients à l’entrée. Pragmatique, elle "attend de voir" avant d’étendre ses horaires et a choisi de conserver ses dimanches d’ouverture alors qu’au Furet du Nord, "des amplitudes horaires élargies et des ouvertures dominicales supplémentaires sont adaptées pour chaque site."
Des appréhensions
Tout à leurs préparatifs, les libraires ne peuvent toutefois pas s’empêcher de nourrir quelques inquiétudes : fréquentation et gestion des affluences ; réapprovisionnements tendus voire "cannibalisés par les grandes enseignes", pointe Bertrand Watelet ; articulation entre click and collect, livraisons et clients en magasin ; "éventuelle baisse de chiffre d’affaires alors qu’il faudra plus de personnel ou sur de plus larges amplitudes horaires", ajoute Mehdi Bouzoubaa, de Mots et Cie à Carcassonne... Ils peinent à dessiner un scénario bien établi de ce Noël particulier et de ses conséquences. "Mais restons optimistes, martèle Martine Lebeau. Je ne suis pas plus inquiète que cela pour notre profession. Nous allons progressivement rattraper notre retard et sans doute faire un beau mois de janvier", pronostique la libraire qui n’a pas réduit ses achats pour la rentrée d’hiver.