21 août > Roman France

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Sandra Lucbert a l’âge de ses personnages. C’est tout ce que l’on sait d’elle. Mais on est à peu près certain qu’elle partage avec eux plus que la date de naissance. Qu’elle les connaît bien, ces jeunes profs envoyés en banlieue à deux heures de chez eux pour ranger des CDI. Qu’elle a fréquenté la salle H ou L de la Bibliothèque nationale de France et ses étudiants-chercheurs, pâles et frigorifiés. Intellectuels précaires et artistes intermittents, les protagonistes de son premier roman, Mobiles, sont sept jeunes Parisiens, amis de lycée, la vingtaine avancée, qui piétinent devant le guichet « Avenir » de leur existence. On les suit le temps d’une année scolaire, calendrier qui rythme la vie de Méta, la brillante agrégée de lettres d’origine hongroise, TZR, titulaire sur zone de remplacement, qui cale sur le chapitre II de sa thèse sur «L’expérimentation romanesque dans les années 20 ». Elle vit avec Raphaël, qui travaille comme magasinier à la BNF tout en animant la revue La Norme est triste hélas/Et j’ai lu tous les livres et en rêvant de réaliser son premier film. Mathias, le frère de Méta, musicien, est le principal promoteur d’un squat d’artistes où tout est en train de dégénérer. Marianne est « psychologue clinicienne en attente » ; Assia, comédienne, est au RMI ; Pauline veut se mettre en disponibilité de l’Education nationale…

Dans une langue d’élite, truffée de références littéraires - quand le frère et la sœur se donnent rendez-vous dans Paris, ils s’envoient des SMS, citant Marelle de Cortazar et Les chants de Maldoror -, Mobiles parle de la frustration, de l’impuissance d’une génération de jeunes gens dont le capital culturel ne leur assure aucune perspective stable et lumineuse. Le roman n’est toutefois pas seulement un désolant constat sociologique, et on sourit aussi devant l’absurdité de certaines situations, cette obsession de la « cohérence », le verbiage codé de chaque tribu… Une forme d’autodérision bien utile pour tempérer la peur commune et partagée de passer à côté de sa vie. « De finir comme ça ». V. R.

11.10 2013

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